Le film Papicha revient sur une époque récente où les ravages du terrorisme ont durablement marqué la société algérienne. Le début très léger et inconséquent laisse vite place aux menaces, à l’intimidation et finalement à la violence aveugle. Les désirs de liberté sont vite écrasés sous le poids d’une terreur psychologique qui effraye les plus téméraires. La montée du fondamentalisme quitte la zone grise périphérique pour devenir une préoccupation centrale, touchant tous et toutes. Le film se concentre sur les conséquences de cette future guerre civile sur les femmes avec des actrices qui forcent l’admiration. Un film à découvrir absolument au cinéma prochainement .
Un film comme un étendard
Les actrices algériennes du film Papicha sont plongées dans une atmosphère de trouble et de désolation bien éloignée de leurs préoccupations de jeunes adultes, Lyna Khoudri en tête. Interprète de la jeune étudiante Nedma, elle vit une existence entre sorties en boite et rêves de stylisme. Ses sorties nocturnes à travers le grillage défoncé de la Cité U symbolisent ses aspirations à la liberté. La construction d’un mur d’enceinte coïncide avec les premières menaces et la montée des opinions radicales. Marchand de tissu qui abandonne les couleurs chatoyantes pour vendre des Niqabs, petits amis qui n’acceptent plus aucun comportement « déviant », la parole des extrémistes de libère et fait ployer ceux et celles qui voudraient que la société algérienne continue d’être plus tolérante sous le joug de leur intolérance. Difficile à croire qu’il y a moins de 30 ans des kalachnikovs aient pu faire craindre un embrasement généralisé de l’autre côté de la Méditerranée. C’est pourtant ce que raconte ce très beau film. La scène de fin est un sommet d’effroi avec l’exaction finale du film, comme un avertissement à ne pas trop laisser se déployer les ailes noires des extrémistes de ce côté-ci de la Méditerranée. Le parti pris ultra réaliste du film empêche toute ambiguïté, les personnages aspirent avant tout à vivre leur vie, pas à imposer aux autres quoique ce soit, c’est justement ce que les extrémistes n’acceptent pas, jusqu’au passage à l’acte, implacable. La galerie de personnages avant tout féminins fait découvrir des tempéraments et des cas de conscience au début d’une décennie qui aura vu le pays passer tout près d’une guerre ouverte généralisée.
Papicha pourrait rencontrer un très large public grâce à son réalisme total et ses interprétations admirables. Sans pathos ni cours magistral, le film ouvre une lucarne sur un pays plus complexe qu’on ne peut le croire a priori.
Résumé :
Alger, années 90. Nedjma, 18 ans, étudiante habitant la cité universitaire, rêve de devenir styliste. A la nuit tombée, elle se faufile à travers les mailles du grillage de la Cité avec ses meilleures amies pour rejoindre la boîte de nuit où elle vend ses créations aux » papichas « , jolies jeunes filles algéroises. La situation politique et sociale du pays ne cesse de se dégrader. Refusant cette fatalité, Nedjma décide de se battre pour sa liberté en organisant un défilé de mode, bravant ainsi tous les interdits.
Sortie : le 9 octobre 2019 Durée : 01h45 Réalisateur : Mounia Meddour Avec : Lyna Khoudri, Shirine Boutella, Amira Hilda Douaouda | Genre : Drame |