Qu’il emporte mon secret ou lettre ouverte à Sylvie Le Bihan (Seuil)
Impossible de chroniquer le dernier livre de Sylvie Le Bihan, Qu’il emporte mon secret, comme tout autre livre. Une fois ma lecture achevée, j’ai été tellement choquée, bouleversée, que je pense que j’ai besoin d’écrire à Sylvie Le Bihan, un besoin thérapeutique presque vital.
Chère Hélène, ou chère Sylvie,
Vous choisirez le prénom que vous voudrez… J’ai l’impression de connaître Hélène après avoir lu votre livre, Qu’il emporte mon secret. Mais en faisant quelques recherches sur Internet, il se trouve que ce roman est tout à fait autobiographique. Il est tellement bien écrit, tellement bien ficelé, avec à la fois une belle histoire d’amour, un thriller, et surtout un « accident » au cœur de cette vie. Votre vie. Le suspens s’étale de la première page à la dernière. Impossible de lâcher le livre une fois commencé. Avec la peur au ventre.
Je ne vais pas raconter votre vie, ni votre roman car je sais qu’il sera lu et apprécié. Mais je voulais vous remercier d’avoir ainsi apporté votre très précieux témoignage de femme, de femme violée. Alors que vous n’aviez que seize ans. La pire monstruosité possible. Violée par trois hommes, battue, cassée de toutes parts et laissée pour morte…
Ensuite le plus dur fut pour vous : se taire pendant trente ans car on vous l’avait demandé, exigé. A la fois, votre mère, car vous alliez tuer votre père, et un policier. Trente années de votre vie ruinées.
En lisant votre livre, je ne savais rien de votre vie. Et tout au long de ma lecture, j’étais sûre que rien n’était inventé. Tout sonne tellement juste, chaque mot pèse une tonne. Chaque adjectif colle parfaitement à la réalité épouvantable. Vous avez vécu un cauchemar et vous avez trouvé la force de nous livrer votre témoignage. Bravo Sylvie. Non seulement bravo mais merci aussi. Merci pour nous, toutes les femmes. Merci pour les femmes qui ont subi le même sort que vous et n’osent rien dire. Cela leur donnera sans doute du courage pour continuer leur route, mais pas en silence.
Impossible de parler de votre livre. Il est trop personnel, trop intime. Il ne se raconte pas. Il se vit. J’ai vécu avec vous durant toute ma lecture. Et je peux vous dire que j’avais le ventre noué de spasmes. Mais rien en rapport à vos souffrances.
Je vous sais heureuse et entourée, aujourd’hui, heureuse malgré les cauchemars qui ne s’évanouissent jamais totalement. On ne peut jamais oublier…
Que nous soyons homme ou femme, ce livre devrait être lu par chacun de nous. Un livre qui non seulement nous bouleverse mais va faire prendre conscience du pouvoir des hommes, mais aussi du pouvoir des mots et du mal que l’on peut faire aux personnes que l’on aime, sous prétexte de les protéger.
Merci encore Sylvie pour le courage que vous avez eu en vous confiant ainsi totalement et de façon si intime et si belle.
Je vous souhaite maintenant tout le bonheur du Monde !
Bénédicte
« Je ne peux pas t’expliquer pourquoi, pas maintenant, mais sois patient, je te raconterai dès que j’aurai trouvé les mots. J’ai besoin de respirer, encore un peu, un autre air que celui, étouffant, de l’été 1984, celui que j’avais refoulé et que j’ai retrouvé dans une salle de la prison de Nantes, il y a trois semaines ».
Deux nuits ont bouleversé la vie d’Hélène à 30 ans d’intervalle, la troisième, à la veille d’un procès, sera peut-être enfin celle de la vérité…
Alternant le présent et le passé, Sylvie Le Bihan construit un roman à tiroirs où le lecteur est tenu en haleine jusqu’à la fin.
Sylvie Le Bihan Gagnaire dirige les projets internationaux des restaurants Pierre Gagnaire. L’Autre, paru en 2014, avait obtenu les prix du premier roman à la Forêts des Livres et au salon de Chambéry, il est en cours d’adaptation pour le cinéma. Elle a publié son deuxième roman Là où s’arrête la terre en 2015.