Quinze rounds, un livre vérité de Richard Bohringer (Flammarion)
Il est rare que Richard Bohringer se mette à nu ainsi ! Or, dans son livre, Quinze rounds, il n’est question que de lui, de sa vie, de ses douleurs et surtout de ses très nombreuses rencontres, de tous les gens qu’il a aimés. Il nous parle de son enfance, avec sa mamie, la seule personne qui s’est occupé de lui. Il a bien galéré, Richard Bohringer. Pas d’enfance et son adolescence ne fut guère mieux. Peut-être pire même. Très vite, il a fait de mauvaises rencontres, et il est devenu dépendant de cette foutue drogue, toutes sortes de drogues. Jusqu’au coma. Plusieurs fois à l’hôpital entre la vie et la mort. Plusieurs cures de désintox… La drogue, l’alcool, la musique et l’écriture. C’était ça sa vie.
Et puis, peu à peu la vie a commencé à sourire à Richard. Il a fait de belles rencontres. Il a écrit, beaucoup écrit, en écoutant de la musique. Grâce à sa mamie, son HLM refuge pour Richard. Et on a commencé à le lire. Espoir, enfin te voilà ! C’est beau la ville la nuit ! Premier chef d’œuvre de Richard. Et de rencontres en rencontres, le cinéma est venu à lui. D’abord, pour de petits rôles, puis de plus en plus importants. Il nous raconte en détails ses tournages, ses partages avec les équipes de film, avec les gens du pays qui l’accueillait. Toujours émerveillé Richard. Toujours étonné de son propre succès.
Sa vie fut tumultueuse à tous les niveaux. Côté amours, beaucoup de belles femmes et aussi beaucoup de ruptures. Et souvent des enfants… Ses trésors. Sa fierté. Son bonheur. Son style est comme lui : pressé, brut de décoffrage, sans fioriture. On sent l’homme à fleur de peau, écorché vif, comme quand il était gamin. Car dans le fond, Richard, c’est toujours l’enfant abandonné par ses parents, et en plus, le fils du boche… Du lourd, du très lourd à porter.
Richard a eu plusieurs vies en une seule. Il les a toutes vécues à fond, au temps présent. Sa colère le poussait à des extrêmes, toujours, ou presque toujours. L’alcool a été sa plus fidèle compagne… Sa vie n’avait pas vraiment de valeur à ses yeux. Et puis la chance est arrivée ! Enfin ! Il a eu sa place.
Richard a eu plusieurs vies en une seule.
Grâce au cinéma, il a voyagé, à travers le Monde, dans des conditions incroyables ! Même s’il pense que le cinéma l’a aussi fait souffrir, il lui a offert l’Afrique, sa terre d’adoption et le Monde entier ! Des millions de kilomètres parcourus sur cette Planète, grâce au cinéma !
Radio, chanson, écriture, cinéma, théâtre, une vie professionnelle aux mille facettes ! Et toujours le succès au rendez-vous et l’émerveillement de Richard face à ses récompenses. Beaucoup d’amis à qui il rend hommage dans ce livre. Sans doute un peu trop, d’ailleurs. Même à ceux qui sont déjà partis. Même à ceux avec qui il a eu des embrouilles. Ce livre est comme un dernier message d’amitié, ou dernier message d’explication sur des relations pas toujours calmes. Mais uniquement des personnes qu’il a aimées. Pas les autres.
Et puis, arrive ce foutu cancer et tout ce qui va avec … Quinze rounds. Le but de la vie est d’arriver à ce fichu 15ème round, celui qui fait mal, dit-il… Son livre lui ressemble, brut de décoffrage. Il vide son sac. Sans doute avec beaucoup de franchise et sûrement pour la première fois. Comment un homme aussi mal barré dans la vie a-t-il pu faire une telle carrière ? On ne peut qu’avoir de l’admiration pour lui, après avoir lu son livre. C’est incroyable toutes les souffrances qu’il a vécues. Toutes les belles rencontres qu’il a faites aussi. Son livre est un énorme message d’espoir pour les personnes qui galèrent ou souffrent d’une façon ou d’une autre. Richard ne baisse jamais les bras. Il est toujours sur le ring et il vaincra ! Et nous, on l’aime Richard !
Quelques extraits :
P66 : J’ai arrêté la came. Deux comas en dix jours, le flic qui m’avait secoué. La lutte quotidienne pour avoir sa dose et puis, très vite, ses doses. Putain d’héroïne. J’ai bien cru qu’elle allait me faire la peau. J’ai décroché tout seul, avec des tubes de Valium et d’autres produits plus puissants afin de dormir. La sueur, la peur, j’en voulais plus.
P122 : J’écrirai avec ce que je crois. J’écrirai avec ma foi. J’écrirai toujours fraternellement. Ce livre ne sera pas entaché de règlements de comptes ou d’amertume. […] Grâce à la maladie, j’ai retrouvé mon chemin. Je suis l’éditeur du catalogue des grimaces.
P161 : Ecrire pour ne dire que des belles choses, les beaux sentiments, les belles personnes, c’est ennuyeux, cher lecteur. Vouliez-vous un livre plein d’amertume ? Où je vous dirais que puisque je ne tourne plus, c’est la faute des autres ? C’est de ma faute. J’étais infernal.
P268 : Le théâtre est un lieu tranquille. Je me cache dans sa maison. Grâce à toi, ma fille, grâce à toi, Romane. Ce que je peux être, c’est à toi que je le dois. Chaque soir. Ta grâce me bouleverse. Nancy glacée, un vrai paradis.
P279 : Je ne céderais pas, je veux vivre encore. Comme Jean-Baptiste Mendy là-haut sur le ring. Bien sûr que les choses sont âpres avec des moments maudits. Bien sûr que tu chiales la nuit. Tellement tu souffres que la souffrance des autres devient ta lumière. J’ai tellement été con du temps où j’allais bien. Pas tout le temps, mais trop souvent.
« J’ai passé ma vie sur la route. Tout seul. Avec la blonde. Avec mes fils, avec la musique, avec mes filles. Des milliers et des milliers de kilomètres. Coureur de savanes, enjambeur d’océans. T’as trop couru, t’as le souffle court. Les hanches, ça va toujours. Même si elles servent plus à grand chose, elles ont le tempo pour écrire. Voilà ce que je ramène. Quinze rounds. Celui qui clôt. Qui ferme le rideau. »
De l’enfance aux frasques de la jeunesse, des premiers rôles aux succès qui ont jalonné sa carrière, de la découverte de l’Afrique à la passion de l’écriture, Richard Bohringer se raconte dans ce récit au style enfiévré, au rythme syncopé. Tour à tour fulgurant et émouvant, entre coup de blues et coups de coeur, Quinze rounds est un combat qui se livre sous nos yeux en même temps qu’une déclaration d’amour à la vie.
Date de parution : le 11 mai 2016
Auteur : Richard Bohringer
Editeur : Flammarion
Prix : 17 € (292 pages)
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Bonjour !
Entendu Bohringer chez Éric Jeanjean dans la Nightlist sur RTL dans la nuit de dimanche à lundi !
Sous le charme, absolument passionnant !
Cela dit, surtout ne le prenez pas mal -et cela n’empêche pas de se ruer sur ce livre de vie -mais pour l’extrait p.279…
c’est «Je ne céderai pas…,», non «Je ne céderais pas,…» !
La confusion de plus en plus courante entre le futur simple et le conditionnel présent…
Amitiés belges mais surtout francophiles !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Ma version est bien au conditionnel !
Et non au futur !
Très bizarre cette histoire…
Richard Bohringer, un homme dont la révolte me touche. Richard Bohringer, c’est aussi L’ultime conviction du désir. Un livre épique et superbe comme l’écrivain, comme l’acteur. J’en parle ici : http://www.osez-ecrire-votre-roman.com/richard-bohringer-l-ultime-conviction-du-desir/