Salt and Fire, faux thriller et vrai conte philosophique
Ceux qui attendront des étincelles de la rencontre entre Werner Herzog et Michael Shannon en seront pour leurs frais. Si le film débute sur le rythme d’un thriller paranoïaque avec la prise d’otage rocambolesque de 3 scientifiques en mission secrète, le ton dévit rapidement vers l’introspection et la remise en cause de l’exploitation humaine. Comment un lac florissant peut-il s’être transformé en désert de sel aride, et quel est l’héritage laissé aux générations futures, voici les vraies questions posées par un film tourné en 16 jours, avec prises de vue improvisées et scénario à l’avenant. Le résultat n’est pas inintéressant même s’il faut parfois s’accrocher pour ne pas décrocher.
Une adaptation plus plus
Werner Herzog a voulu retranscrire l’ambiance apocalyptique de la nouvelle Aral rédigée par le journaliste, critique et écrivain Tom Bissell. Un lac et ses bateaux ont disparu presqu’entièrement après l’édification d’un ambitieux complexe d’irrigation et la déviation des cours d’eau. Privé de l’apport des rivières, le lac a laissé place à un désert de sel. Werner Herzog s’approprie la nouvelle en situant son long-métrage non plus au Kazakhstan mais en Bolivie, à 4000 mètres d’altitude. Un tournage éclair de 16 jours a abouti à un film long et lent, rythmé par les discussions philosophiques entre la scientifique et le kidnappeur. Le syndrôme de Stockholm joue à plein jusqu’à l’abandon en plein désert de la belle. Sa rencontre avec 2 jeunes enfants presqu’aveugles va aider à sa prise de conscience face au drame de l’exploitation humaine.
Un conte philosophique
La plus grande partie du film se passe de rythme et d’intrigue. Peu importe qui sont les personnages, l’important tient dans le focus sur l’aveuglement humain face à la destruction de la nature. Mythes et légendes s’installent langoureusement tandis que le temps devient immobile et trivial face à l’étendue désertique et hypnotique. Ce film est un voyage intérieur qui pourra laisser certains de marbre, une bonne endurance est nécessaire pour ne pas s’assoupir. Mais le jeu en vaut la chandelle, les images sont magnifiques et le film pourrait presqu’être un documentaire informatif sur la voie tracée par l’humanité vers le point de non-retour. Sans remise en cause et examen de conscience, l’humanité pourrait disparaitre, définitivement.
Ce Salt and Fire onirique marque une nouvelle étape dans la filmographie de Werner Herzog. Toujours désireux de se confronter à des conditions extrêmes, il se frotte ici à la destruction de l’écosystème pour une réflexion intéressante même si souvent aussi aride que son désert de sel.
Une scientifique accuse le responsable d’une grande entreprise d’avoir provoqué un désastre écologique dans le désert de Bolivie. Tourné dans le désert de sel d’Uyuni, le nouveau film de Werner Herzog est un thriller écologique, inspiré d’une nouvelle de Tom Bissell.
Sortie : le 7 décembre 2016
Durée : 1h33
Réalisateur : Werner Herzog
Avec : Michael Shannon, Gael Garcia Bernal, Veronica Ferres
Genre : Thriller