Un futur anxiogène si réaliste dans la pièce Système d’exploitation à la Folie Théâtre

A la Folie Théâtre propose un saut dans le temps avec la description d’un futur proche dystopique pourtant si semblable aux pires fléaux de notre présent. La privatisation des services publics, l’effondrement écologique, la violence généralisée, e cadre de vie est dominé par les écrans et les rapports de puissance. 5 personnages sont constamment au bord du précipice et tentent de survivre à l’ombre de l’IA Minotaure en charge du système d’exploitation. Jusqu’au drame dans une agence de la CAN (Caisse d’allocation nationale). Les 5 comédiens (Karine Bocobza, Adeline Belloc, Xavier Kutalian, Amira Hadzic, Tom Bérenger, en alternance) font vivre la pièce de l’auteur et metteur en scène Luc Mouret rivalisent de talent et d’implication pour subjuguer les spectateurs dans une scénographie dense et fascinante.

Du non-sens entre Black Mirror et la 4e Dimension

Les références culturelles sont nombreuses dans cette pièce d’une belle densité. Des références culturelles qui parleront à tout le monde pour créer un cadre commun d’identification. Les noms empruntent à la mythologie grecque pour souligner l’omniprésence de dieux (technologiques) taquins et trompeurs. Les destins sont constamment contrariés par des volontés supérieures qui créent des conditions de vie proches de la torture permanente. L’employée de la CAN acculée par les objectifs de rentabilité inatteignables et des conditions de travail qui l’empêchent d’aider les allocataires démunis (Dédaleen pleine quadrature du cercle permanente), le livreur de repas aussi mal considéré qu’incapable d’empêcher les commandes manquantes (Hermès en quasis sosie de Freddie Mercury), la maman aux abois sous la crainte de perdre la garde de ses enfants mais que le système a sorti des bases de données l’empêchant ainsi de toucher ses allocations (Gaïa, proche de la Mother du film d’Aronofsky), le jeune homme en pleine crise existentielle à tendance psychanalytique (Morphée en saillant legging moulant dans une caricature de jeu télévisé), la militante écologiste catastrophiste que personne n’écoute (évidemment nommée Cassandre). L’auteur s’inspire du quotidien actuel pour imaginer un futur en tous points pires que les extrémités du présent. Les situations suscitent immanquablement l’empathie du public. Qui n’a pas eu maille à partir avec des services administratifs sourds aux demandes et incapables d’y répondre, ou à une commande Uber dans laquelle manquent des éléments de la commande? La narration non linéaire de la pièce intercale numéros de danse contemporaine, musique industrielle sous influence Nine Inch Nails, scénettes tragicomiques et constats accablants de la diminution des rapports humains. Les écrans ont pris toute la place, les personnages ont choisi de se laisser guider par l’IA, hélas à leurs dépens malgré l’espérance de simplification de l’existence. Le constat est sans retour, l’humain est devenu secondaire dans un monde où les rapports de puissance ont remplacé l’émulation collective.

Le théâtre gagne ici de belles lettres de noblesse, lanceur d’alertes, poétique, cathartique, il se place sous le haut patronage de Bertold Brecht en utilisant le rire pour dénoncer. Aussi moderne qu’accessible au plus grand nombre, Système d’exploitation est une terrifiante réussite qui mêle émotion et érudition avec la validation d’un public nombreux et enthousiaste, comme l’a prouvé la salve d’applaudissements finale.

Synopsis: Comment ne pas devenir fou quand les écrans sont partout ? L’intelligence artificielle « Minotaure » mène l’enquête. Dans un futur proche, alors que la crise écologique et économique s’accélère, les citoyens restent scotchés à leur smartphone. Deux coups de feu résonnent dans une « agence sociale » récemment privatisée. Cassandre une militante éco-anxieuse, Morphée un chômeur insomniaque, Hermès un livreur ubérisé, Gaïa une mère isolée et Dédale une cadre en burn-out, étaient sur place. Que s’est-il passé ?
Leurs méta-données vont être croisées et analysées sous nos yeux. Système d’exploitation est une tragi-comédie dystopique entre Brecht et Black Mirror.

Détails:

Du jeudi 2 février au samedi 15 avril 2023.
Du jeudi au samedi à 21h30

Tarifs:

Plein : 24€

Réduit : 18€ info-bulle

NOS NOTES ...
Originalité
Mise en scène
Jeu des comédiens
Plaisir de la pièce
Stanislas Claude
Rédacteur ciné, théâtre, musique, BD, expos, parisien de vie, culturaddict de coeur. Fondateur et responsable du site Culturaddict, rédacteur sur le site lifestyle Gentleman moderne. Stanislas a le statut d'érudit sur Publik’Art.
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