Un nouveau pensum cinématographique documenté et analytique consacré à Tony et Ridley Scott, frères d’armes aux éditions Playlist Society
Tout le monde connait les oeuvres cinématographiques de Ridley Scott et de son frère Tony Scott. Tous deux réalisateurs à succès d’opus parfois autant commerciaux qu’ambitieux, ils ont marqué le cinéma de leur empreinte depuis la fin des années 70. Si le second a plutôt commis des films directs voire musclés (Top Gun, Man on Fire, USS Alabama) et le premier des films à haute teneur esthétique (Les Duellistes, Alien, Blade Runner), l’auteur Marc Moquin tente de rapprocher leurs visions dans une analyse aussi fouillée que synthétique (comme toujours) pour une thèse qui en impose.
Deux frères antagonistes?
Le spectateur moyen assidu des salles obscures serait plutôt tenté de séparer les deux frères tant leurs films semblent s’adresser à des publics diamétralement opposés. Et pourtant, le nombre de points communs relevés par Marc Moquin tend à accréditer la thèse de deux oeuvres miroirs. Tous deux passés par les Beaux-Arts puis par la publicité avant d’atterrir au cinéma, ils ont tous les deux choisi de placer l’humain au centre de leurs oeuvres. L’homme contre le système, l’homme contre l’adversité, l’homme contre la fatalité, l’homme contre les préjugés, l’homme contre son empreinte génétique. Dans le même temps, la quête de soi enjoint les héros à se surpasser pur prouver autant aux autres qu’à eux mêmes de quoi ils sont capables. Les symboliques mythologiques ou bibliques abondent dans des films qui se découvrent et se redécouvrent années après années. L’ouvrage de Marc Moquin fait naviguer dans deux oeuvres marquantes du cinéma contemporain avec des liens constants entre deux filmographies qui renvoient intimement l’une à l’autre. Les puristes de l’un ou de l’autre des deux réalisateurs trouveront leur compte dans un ouvrage qui se dévore eu égard à son nombre de pages restreint et à son prix tout riquiqui. Les béotiens pourront également se risquer dans une introduction érudite à deux oeuvres qui ont su multiplier les morceaux de bravoure. Des Prédateurs à Kingdom of Heaven, en passant par True Romance et Gladiator, les longs métrages héroïques alternent avec des ambiances plus intimistes pour des oeuvres qui ont su renvoyer l’une à l’autre, volontairement ou pas jusqu’au décès de Tony en 2012. Reste Ridley pour perpétuer l’oeuvre familiale, avec plus ou moins de bonheur selon les films mais en creusant toujours le sillon de l’homme qui veut se révéler à lui-même.
Tony et Ridley Scott Frères d’Armes est un ouvrage aussi érudit que divertissant, un très bon ouvrage à poser sur sa table de nuit pour dévorer quelques pages chaque soir et programmer des visionnages pour les jours suivants, fidèle à la ligne éditoriale des éditions Playlist Society. A quand un ouvrage sur Stanley Kubrick?
À eux deux, les frères Tony et Ridley Scott possèdent une filmographie regroupant plus d’une quarantaine de longs métrages. Malgré une complicité certaine et des parcours similaires – des beaux-arts au cinéma en passant par la publicité –, ils n’ont jamais travaillé ensemble. Tout semble les opposer : le premier est un démiurge à la tête de grandes fresques historiques ou d’odyssées SF, le second, un auteur de films d’action frénétiques et musclés.
Pourtant, se dessine en filigrane au sein de leurs œuvres une approche commune, celle de films mondes dans lesquels l’humain est au cœur des systèmes politiques qu’il combat. De Blade Runner à Man on Fire, de Thelma et Louise à True Romance, d’un frère à l’autre, c’est toute une vision du cinéma qui se construit peu à peu.
Tony et Ridley Scott, frères d’armes montre comment les deux réalisateurs ont revisité, chacun à leur façon, les genres cinématographiques, tout en remettant en question les codes établis, poursuivant la même obsession.
Date de parution : le 23 mai 2018
Auteur : Marc Moquin
Editeur : Playlist Society
Prix : 14 € (160 pages)
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