Paul Wittgenstein fut un pianiste marquant du XXe siècle, Yann Damezin lui consacre tout un épais volume pour faire ressortir la complexité d’une vie marquée par des choix paradoxaux et des coups du sort dramatiques. Devenu manchot suite à la première guerre mondiale et la perte de son bras droit au combat, les plus grands compositeurs lui ont créer des morceaux, comme Ravel avec son célébrissime Concerto pour main gauche. L’auteur dessinateur agrémente son récit d’enluminures naturalistes qui rappellent la beauté d’un autre ouvrage récent des plus marquants, Habibi de Craig Thompson. Le récit est passionnant, les dessins sont magnifiques, que demande le peuple?
Une histoire du XXe siècle
Yann Demaizin extrapole autour de la biographie du pianiste autrichien Paul Wittgenstein pour imaginer les pensées et les sentiments d’un personnage ni vraiment sympathique, ni complètement plaisant. L’auteur en fait un récit onirique, entre rêve et réalité, ce que les illustrations constantes sur chaque case avive magnifiquement. Entre les personnages et les détails, ce sont des feuilles, des oiseaux ou des fleurs qui emplissent l’espace, et la biographie gagne autant en symbolique qu’en métaphore, gagnant en contenu et en sentiments. Sa vie est augmentée et la narration requiert un temps considérable pour le lecteur désireux d’en appréhender chaque détail. Fils d’un illustre industriel, le jeune homme s’est concentré sur son instrument avec pour objectif de devenir un soliste recommandable, sous le regard inquisiteur de parents opposés à son projet. Quand il doit partir à la guerre sur le front russe dans les rangs de l’armée autrichienne, il est estropié et souffre le martyr, autant physiquement que moralement. Mais il n’en démord pas et travaille le piano mordicus avec la main gauche. Ce que la BD ne dit pas, c’est que toutes les commandes auprès de compositeurs illustres, Strauss, Prokofiev ou Ravel, l’ont été grâce aux deniers familiaux, donnant la mesure de sa richesse. Ses tournées dans le monde, ses amours contrariés et son destin tragique sont racontés par le scénariste dessinateur dans un rythme qui ne faiblit que rarement.
La lecture de cette BD tient autant du roman que du tableau. Les cases sont richement décorées et le destin du personnage tient autant du parcours du combattant que de l’extase artistique. L’ouvrage rend honneur au pianiste même s’il ne ménage pas l’homme décrit bien souvent comme un personnage peu recommandable, ce qui n’empêche en rien la découverte d’une bande dessinée au noir et blanc éblouissant.
Inspiré par la biographie du pianiste autrichien Paul Wittgenstein, Concerto pour main gauche nous transporte dans un univers onirique et poétique, au cœur de la psyché de ce personnage tourmenté, mélancolique et complexe, que seule la musique semble apaiser.
Blessé lors de la première guerre mondiale, Paul Wittgenstein fut amputé du bras droit mais poursuivit une carrière de concertiste malgré ce handicap. La fortune laissé par son père lui permit de commander des œuvres pour la main gauche aux plus grands compositeurs de l’époque. Ainsi, c’est à sa demande que Maurice Ravel composa le célèbre Concerto pour la main gauche.
Un destin extraordinaire porté par l’élégance et la poésie du dessin de Yann Damezin.
Un premier album magistral, entre David B. et Nancy Peña…
Date de parution : le 9 novembre 2022
Scénariste(s) : Yann Damezin
Dessinateur(s) : Yann Damezin
Genre : Biopic
Editeur : La Boîte à Bulles
Prix : 17 € (112 pages)
Acheter sur : Amazon l BDFugue