Beijing Stories, un film de Pengfei Song
Des quartiers démolis à la ville souterraine habitée par des milliers de travailleurs, beaucoup subissent la vie que leur offre Beijing, malgré sa croissance exponentielle. Mais les rêves perdurent, et la douceur émerge là où on ne l’attendait pas. Pour son premier long-métrage, Pengfei signe un film touchant et éclairant.
Dans ce film peu bavard, la souffrance sociale est peinte sans pathétique, mais avec bienveillance, par un réalisateur très attaché à la culture chinoise.
Corruption, quartiers détruits, spéculation immobilières, Beijing Stories donne à voir le mille-feuille d’une ville. Ici, les histoires de « démolitions et relogement », incarnées dans celle de Jin, sont fréquentes. Des quartiers entiers sont rachetés par des promoteurs pour être rasés et devenir des emblèmes de modernité. En de longs plans fixes, la caméra est posée devant ce spectacle implacable, nécessaire à la croissance folle de Beijing. Jin et sa femme négocient patiemment avec des commerciaux fourbes pour ne pas partir plus pauvres qu’ils ne le sont déjà. Leur rêve, mentionné avec pudeur, serait d’habiter une villa en bord de lac…
Dans ce film peu bavard, la souffrance sociale est peinte sans pathétique, mais avec bienveillance.
Un peu plus loin, et en souterrain, vit le peuple rampant, logé dans les caves mais qui, lui aussi, rêve. Venus de province pour travailler dans la capitale, ils sont appelés les « beipiao », les « errants de Beijing ». Pourtant, dans l’atmosphère rude et égoïste qui y règne, dénote la relation tendre et simple de Xiao Yun et Yon Le. Telle Ariane et son fil, Xiao Yun la gogo danseuse déroule une cordelette dans le labyrinthe des appartements souterrains pour guider le revendeur de meubles devenu aveugle.
La chambre de Xiao Yun est entièrement recouverte de sacs de shopping, comme un rappel permanent de la consommation qu’elle ne peut se permettre. Elle aspire à troquer son costume de gogo danseuse pour un tailleur, et pour un travail plus honorable.
Pour autant, et malgré la peinture sombre qui est faite de la vie à Beijing, les couleurs vives et les animaux viennent apporter une note d’humour et de légèreté. Portée par la superbe musique de Jean-Christophe Onno, la fin mélancolique, bien loin du happy ending, choisit de laisser en suspens le destin des personnages, laissant le spectateur tirer son propre enseignement de ces tranches de vie.
Beijing. 23 millions d’habitants et une croissance urbaine démesurée. Sans cesse des quartiers sont détruits et reconstruits pour la nouvelle classe moyenne. Pour gagner sa vie, Yong Le récupère des meubles usagés dans les maisons abandonnées. Xiao Yun, elle, danse dans un bar. Tous deux habitent la « ville souterraine » et rêvent d’en sortir. Jin, lui, a sa maison. Il rêve pourtant d’ailleurs. Son quartier va être détruit. Il a accepté de partir mais il doit d’abord vendre sa maison à un prix décent. Trois rêves, trois destins, trois histoires de la ville. De la Chine d’aujourd’hui.
Sortie : le 6 janvier 2016
Durée : 1h15
Réalisateur : Pengfei Song
Avec : Ying Ze, Luo Wenjie, Zhao Fuyu
Genre : Drame