Le Grand Jeu, séduisant sur le papier, inconstant à l’écran

Le Grand Jeu
Le Grand Jeu, film de Aaron Sorkin, Copyright SND

Le Grand Jeu, séduisant sur le papier, inconstant à l’écran

Le scénariste Aaron Sorkin passe derrière la caméra et ne prend pas beaucoup de risques en copiant allègrement le scénario de The Social Network qu’il avait lui même présenté à David Fincher. Dans un nouveau contexte et avec de nouveaux personnages, Jessica Chastain remplace Jesse Eisenberg dans le rôle de la surdouée attaquée en justice mais toujours agile pour ne jamais se laisser décontenancer et garder la tête froide en toutes circonstances. Ne pas de fier au pitch trompeur du film qui le compare bizarrement avec Le Loup de Wall Street en version féminine. Un procès en fil rouge, de nombreux flash-backs qui déconstruisent l’intrigue, des révélations incessantes, une ténacité à toute épreuve, de la résilience en toutes occasions, de l’ironie mordante… ça ne vous rappelle vraiment rien?

Poker, ton univers impitoyable

Les américains adorent ces histoires de self made men partis de rien, devenus des rouages essentiels des abysses du capitalisme avant de s’y brûler les ailes. En y ajoutant si possible un peu de complexe d’oedipe et de psychologie légèrement simpliste afin de boucler la boucle de la psychés du héros. Le personnage de Molly Bloom qu’interprète la toujours flamboyante Jessica Chastain a réellement existé et Aaron Sorkin insiste bien sur son contexte familial et son génotype de winneuse. Promise à un brillant avenir dans l’équipe américaine d’alpinisme, un accident lui fait reconsidérer son destin. Débarquée à Los Angeles pour une année sabbatique avant d’entreprendre ses études de droit, la brillante jeune femme apprend illico les rouages du star system et l’intérêt qu’elle peut trouver à organiser des parties de poker clandestines pour des richards tout près à distribuer de substantiels pourboires. Le film suit un récit tout en flashbacks à partir du moment où l’héroïne est attaquée en justice plusieurs années après ses exploits. Obligée d’embaucher un avocat roublard campé par l’ex-futur James Bond Idris Elba, le fil de sa vie se déroule devant les yeux des spectateurs en mode filou experte. Et tout comme The Social Network, son débit mitraillette accompagne les images avec recul et effervescence dans un déroulé sans fin de manigances et d’apparences trompeuses. Car là où l’héroïne espère gagner sa vie le plus honnêtement possible, elle se rend vite compte que la clandestinité fait côtoyer des crocodiles avides de chaire fraiche et dénués de tout scrupules.

Tomber, se relever, retomber et se relever à nouveau

Et le film continue sans fin sur le mode American Warrior, rien ne m’abattra jamais, je suis une américaine. Malgré les arnaques et les entourloupes, Molly Bloom quitte la jungle de Los Angeles pour celle de New York, gardant en tête sa volonté de se refaire continuellement, comme tout joueur de poker qui se respecte. Sauf que les acteurs en goguette sont remplacés par la mafia russe, ce qui change passablement le niveau de risque. Le film insiste fortement sur des péripéties répétitives pour en mettre plein les mirettes, plongeant l’héroïne au milieu d’un univers mâtiné des pires extrémités de notre temps, avec une gradation dans les dangers auxquels elles se confronte, transformant l’intrigue en parodie de film noir. L’argent à foison transforme-t-il automatiquement les êtres humains en êtres vachards et égocentriques? La thèse d’Aaron Sorkin tend un miroir peu glorieux de l’humanité dans une ambiance où l’argent coule à flots et où l’empathie est réduite à sa portion congrue. La relation client/avocat fournit son lot de phrases truculentes et la relation fille/père se concentre sur un examen de conscience bien américain. Au final, le film finit par ennuyer par son alternance de grandes désillusions et de leçons magistrales. Au moins, le personnage de Mark Zuckerberg ne se justifiait pas et menait sa barque crânement, tandis que Molly Bloom parait constamment sur la brèche entre action et dépression.

Le Grand Jeu offre de bons moments de spectacles avec ses scènes de poker grandiloquentes et des rebondissements hollywoodiens. Cependant, un visionnage suffit car  le film n’offre pas de scènes aussi tragicomiques que celles de The Social Network qui lui peut se regarder à l’envi.

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Le Grand Jeu
Le Grand Jeu

La prodigieuse histoire vraie d’une jeune femme surdouée devenue la reine d’un gigantesque empire du jeu clandestin à Hollywood ! En 2004, la jeune Molly Bloom débarque à Los Angeles. Simple assistante, elle épaule son patron qui réunit toutes les semaines des joueurs de poker autour de parties clandestines. Virée sans ménagement, elle décide de monter son propre cercle : la mise d’entrée sera de 250 000 $ ! Très vite, les stars hollywoodiennes, les millionnaires et les grands sportifs accourent. Le succès est immédiat et vertigineux. Acculée par les agents du FBI décidés à la faire tomber, menacée par la mafia russe décidée à faire main basse sur son activité, et harcelée par des célébrités inquiètes qu’elle ne les trahisse, Molly Bloom se retrouve prise entre tous les feux…

Sortie : le 3 janvier 2018
Durée : 2h20
Réalisateur : Aaron Sorkin
Avec : Jessica Chastain, Idris Elba, Kevin Costner
Genre : Thriller, Drame

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NOS NOTES ...
Originalité
Mise en scène
Réalisation
Jeu des acteurs
Stanislas Claude
Rédacteur ciné, théâtre, musique, BD, expos, parisien de vie, culturaddict de coeur. Fondateur et responsable du site Culturaddict, rédacteur sur le site lifestyle Gentleman moderne. Stanislas a le statut d'érudit sur Publik’Art.
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