Terry Gilliam a son style bien à lui, fait de bizarrerie scénaristique et d’inventivité formelle. Son premier film Jabberwocky, sorti en 1977, ne dépareille pas dans sa filmographie et pose les jalons d’une carrière assez unique. Certains le trouveront un peu daté, d’autres loueront sa grande modernité, le réalisateur ne sait pas laisser indifférent. Le Monty Python reprend certains des codes du célèbre groupe comique pour se les approprier et liver un opus pétaradant de douce ironie.
Un conte médiéval surprenant
Jabberwocky est un conte fantastique sur le thème moyenâgeux de l’individu de rien du tout qui doit affronter un horrible dragon pour séduire sa belle. Sauf qu’avec Terry Gilliam, ça ne peut décidemment pas être si simple. Sous les couverts d’une reconstitution historique croquignolette se cache une critique acide des travers de notre époque, du capitalisme jusqu’à la société de consommation en passant par l’individualisme galopant. Le monstre horrible qui effraie le royaume ne dévore que les petites gens, la plupart très peu charitables. Le contexte reprend les codes du Moyen-âge, l’indigence règne et les seigneurs omnipotents se rient bien de la plèbe besogneuse. Surtout que les atrocités font partie du quotidien et que personne ou presque ne s’émeut d’évènements qui feraient frémir l’homme moderne. Le royaume est dirigé par le sinistre Bruno le Contestable, le bien nommé à en juger par son comportement constamment très limite. L’absurdité apparente de l’histoire laisse deviner en filigrane des questions sociales toujours d’actualité aujourd’hui. Disparités sociales, basse condition de la femme et discriminations sociales sont les fléaux d’un royaume supposé très daté, et pourtant la situation persiste encore aujourd’hui avec pour conséquences la pauvreté, l’extrémisme politique et le chômage de masse. Le héros du film, Dennis, est un homme simple, apprenti tonnelier de son état, chassé de chez lui par son père aigri, méprisé par sa donzelle de cœur et exilé au cœur d’une cité où il ne parvient pas à trouver du travail. La quête du monstre parait presque secondaire. L’obscurantisme règne et la description sociale décoche d’immanquables sourires avec un héros maltraité par tous et tout le temps pour une métaphore cynique de la dureté de la vie. La restauration 4K apporte au film une surprenante modernité.
Les DVD et BluRay de Jabberwocky comptent des suppléments exclusifs qui permettent de prolonger le plaisir pour un visionnage surprenant, destiné aux fans nombreux de Terry Gilliam qui n’auront jamais encore vu ce film bien difficile à trouver, jusqu’à maintenant.
Synopsis: À la mort de son père, le jeune Dennis décide de tenter sa chance en ville dans l’espoir de conquérir le coeur de sa dulcinée, Griselda, restée au village. Pendant ce temps, un horrible monstre surnommé Jabberwocky fait régner la terreur, tuant et anéantissant tout sur son passage. Voyant son royaume menacé, le roi Bruno le Contestable promet la main de sa fille à celui qui terrassera la bête…
cité où il ne parvient pas à trouver du travail. La quête du monstre parait presque secondaire?
Le bonheur de l’homme aujourd’hui consiste à s’amuser et à regarder des films pour le plaisir.
Le plaisir aussi, mais pas uniquement !