« La Collection » : un quatuor d’acteurs de choc pour Pinter

"La Collection" : un quatuor d'acteurs de choc pour Pinter
Photo © Gwendal-Le-Flem

« La Collection » : un quatuor d’acteurs de choc pour Pinter

Harold Pinter (1930 – 2008), prix Nobel de littérature en 2005, participe au renouveau théâtral britannique dans les années 1950. Le malaise et la cruauté qui se dégagent de ses premières œuvres, qualifiées de « théâtre de la menace », évoluent vers l’exploration de l’intimité puis, à partir des années 1980, vers le politique.

« La Collection », écrite en 1961, dépeint avec férocité les rapports ambigus entre trois hommes et une femme. La pièce orchestre, sous le venin du mensonge et des rapports de domination, le trouble des passions humaines.

L’intrigue est simple. James, persuadé que sa femme l’a trompé lors d’un voyage d’affaires à Leeds, arrive à l’appartement de l’amant présumé, Bill. Ce dernier vivant avec Harry, dont on suppose qu’il est le compagnon, pourrait se contenter de nier. Mais il reste ambigu.

L’enjeu ici n’est pas de connaître la vérité mais de sonder des personnages sous l’emprise du poison du doute qui se répand, où se fait jour alors entre les protagonistes de la rancœur, de la jalousie, des rapports de force, de désirs, de violences, de classes sociales.

Le trouble des passions humaines

Harold Pinter brouille à l’envi les énigmatiques liens tissés par les deux couples où chacun a construit sa propre vérité et donc son mensonge vis à vis de lui même et de l’autre. Car ce sont les faux-semblants d’un milieu, les non-dits, les secrets de l’âme humaine, les rapports de force, les passions et les désirs inavoués, la solitude qui sont tour à tour scrutés par le dramaturge anglais.

Ce sont quatre personnages seuls avec eux-mêmes qui errent dans un vide existentiel, n’arrivant pas à partager une vérité fiable. Un isolement qui les expose à une relation individuelle et biaisée à la vérité. Une incommunicabilité qui se cache sous un masque ironique ou agressif.

L’absurde est aussi convoqué, nous rappelant Beckett où cette absurdité se veut une allégorie de notre condition humaine : le drame vient de ce que nous ne pouvons pas savoir. Dès lors, il est difficile d’agir et de donner du sens à ses actes.

Servie par un casting hors pair : Mathieu Amalric, Valérie Dashwood, Laurent Poitrenaux et Micha Lescot, la mise en scène de Ludovic Lagarde qui fait la part belle aux silences glaçants, à un humour incisif et à une direction d’acteurs au cordeau, magnifie cette histoire de sous-entendus, emprunte de fantasmes et d’ambiguïté. Bravo !

Dates : 30 mai au 25 juin 2023 – Lieu : Théâtre de l’Atelier (Paris)
Mise en scène : Ludovic Lagarde

NOS NOTES ...
Originalité
Scénographie
Mise en scène
Jeu des acteurs
Amaury Jacquet
Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.
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