“Le rêve et la plainte”, Marie-Antoinette en goguette mais pas que !
Marie-Antoinette et la Princesse de Lamballe prennent le thé dans le salon du Petit Trianon de Versailles, vêtues de leurs splendides robes rococo… Et tout de go, la reine déclare : « Alors j’ai commencé un bac STT option puériculture puis j’ai fait BTS-commerce parce que j’avais pas vraiment de choix de carrière ». Etonnant non !
Car en fait, nous sommes à Nice, où ceux qui reçoivent sont très satisfaits de leur nouvelle cuisine MOBALPA et dissertent allègrement de son aménagement…
Des scènes de la vie quotidienne mais pas que où chacun tient son rôle et sa position pour mieux en singer l’air du temps à travers un télescopage de haut vol entre monarchie à bout de souffle et V République sans foi ni loi !
Entre le XVIII et le XXIe siècles, il n’y a qu’un pas…
Bercée par les notes douces d’une musique baroque spécialement composée pour l’occasion, on dévisse donc de tout et de rien pour combler un vide abyssal et déjouer une peur sous-jacente de finitude. Dans une atmosphère de fin de siècle et une attitude aussi contemplative que loufoque, on voit les protagonistes, malgré une menace diffuse, faire preuve d’une gaieté inébranlable et d’un sens du devoir.
Une représentation allégorique du passage du temps qui cristallise une vacuité des passions et des activités humaines et révèle l’envers du décor sur un ton doucereux : vanité, désœuvrement, et peinture sociale sont à l’œuvre à travers un couple royal à la faconde méridionale et un peu barré qu’un pique-nique avec quadras motorisés nous confronte au réel.
Le tout jalonné d’une poésie du vide, d’un humour subtil, d’une mélancolie singulière et inquiétante, d’une absurdité de la profondeur, d’une omniprésence du décalage en tant qu’écriture théâtrale portée par Nicole Genovese, du jeu carnavalesque et de ses masques, d’une certaine idée du hors du jeu et d’un trompe l’œil face au réel. En un mot la grande classe !
La troupe dans cette fuite en avant est formidable de surréalisme, d’audace, de générosité et d’inventivité. Mention spéciale à Maxence Tual et Nabila Mekkid en couple royal dont la niaiserie attendrissante de Louis XVI n’a d’égale que la bienséance souveraine, acidulée et méditerranéenne de la reine !
A l’abri d’une esthétique baroque et enjôleuse dans un geste sûr de Claude Vanessa, la troupe éprouve, pour mieux s’en moquer mais aussi les revisiter, les formes de la représentation théâtrale. Un geste salutaire et unique. Bravo !
Dates : 9 au 30 décembre 2022 – Lieu : Théâtre des Bouffes du Nord
Texte : Nicole Genovese – Mise en scène : Claude Vanessa
En tournée :
– 26 et 27 janvier 2023 au Trident – Scène nationale de Cherbourg
– 31 janvier et 1er février 2023 au Théâtre de Lorient / CDN de Lorient
– 9 février 2023 au Tangram – Scène nationale Evreux-Louviers
– 7 mars 2023 au Circa, Auch
– 9 mars 2023 au Parvis – Scène nationale de Tarbes Pyrénées
– 14 au 16 mars 2023 au Théâtre Sorano – Scène Conventionnée, Toulouse
– 21 et 22 mars 2023 à Châteauvallon-Liberté – Scène nationale, Châteauvallon
– 30 et 31 mars 2023 à La Renaissance, Oullins
Je sors d’une représentation à la Roche sur Yon : un ennui MORTEL, ma voisine s’est endormie ;-((