Louis Soutter, Parvis, 1937-1942, dessin aux doigts, encre sur papier. Courtesy Galerie Karsten Greve, Cologne, Paris, Saint-Moritz, © Galerie Karsten Greve, Cologne
Maison de Victor Hugo jusqu’au 30 août 2015
Poursuivant l’exploration des liens entre l’œuvre de Victor Hugo et l’art moderne, la Maison de Victor Hugo propose la confrontation des dessins du poète avec ceux de Louis Soutter.
Qu’y-a-t-il de commun entre l’un des plus célèbres écrivains français et un violoniste suisse placé sous tutelle dans un hospice pour vieillards, ayant chacun vécu dans un siècle différent, sinon la pratique d’un dessin visionnaire, hors norme et hors marges, brouillant les frontières de l’art ?
L’exposition Louis Soutter – Victor Hugo, Dessins parallèles montre pour la première fois les liens ténus entre ces deux œuvres majeures, en rendant hommage à une figure singulière, Louis Soutter.
Dessinateur et violoniste, Louis Soutter (1871-1942), un temps classé par Jean Dubuffet parmi les artistes d’art brut, est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands artistes du XXe siècle. Il se met à dessiner alors qu’il est placé à l’âge de cinquante-deux ans dans un hospice du Jura vaudois, produisant une quarantaine de cahiers d’écolier et recouvrant d’annotations et de croquis de nombreux livres d’art et d’architecture.
Louis Soutter « Ame » « Partie » 1937-42 Gouache, peinture aux doigts sur papier
© Musée des Beaux arts de Lausanne
Cousin des architectes Le Corbusier et Pierre Jeanneret, il puise son inspiration chez divers auteurs de théâtre, de roman et de poésie. C’est précisément dans ses dessins qu’il lui arrive d’évoquer Victor Hugo, ainsi que William Shakespeare, figure de référence de la création hugolienne. Il est ainsi remarqué par des écrivains comme Jean Giono ou Charles-Ferdinand Ramuz qui l’aident, lui permettant de développer son œuvre jusqu’à la sublime explosion des dessins aux doigts.
Louis Soutter – Victor Hugo, Dessins parallèles prend pour point de départ les dessins de Louis Soutter faisant explicitement référence à Victor Hugo – principalement autour de ses romans NotreDame de Paris et Quatrevingt-treize – réunis dans la première salle.
Victor Hugo, Figure de fantaisie, exposée à la maison Victor Hugo dans le cadre de l’exposition « Louis Soutter – Victor Hugo » Dessins parallèles
© Maison Victor Hugo / Roger Viollet
Une seconde section, très développée, fait ensuite dialoguer les deux artistes à travers des thèmes iconographiques qui leur sont communs – paysages suisses, burgs, châteaux et villes imaginaires, rêveries sur des thèmes héraldiques, architectures orientales, vision de la femme, etc. – révélant d’étonnantes rencontres.
Une troisième étape explore la relation des deux artistes sur le mode poétique, rapprochant de vers de La Légende des siècles des dessins où Soutter semble faire sien le projet hugolien et revisite à son tour l’histoire de l’humanité.
Enfin, se plaçant sous le signe de Shakespeare, figure commune de leur panthéon respectif, la dernière section s’attache à montrer – notamment avec l’engagement plus direct du corps dans la pratique commune du dessin aux doigts – comment les deux artistes incarnent à travers leurs œuvres la vision humaniste qui est la leur. Sans dogmatisme, basé sur la sensibilité visuelle, ce parcours invite ainsi à suivre les pas de deux artistes singuliers qui, indépendamment de toute pratique professionnelle ou académique, bousculent les catégories de l’art en véritables révélateurs d’âme qui ne se laissent guider que par leur vision et leur liberté.