Musicalité des corps et contemporanéité pour une rentrée gagnante du Ballet à Garnier
Les chorégraphes Tino Sehgal, Justin Peck, William Forsythe, et Crystal Pite ont inauguré avec brio la soirée d’ouverture de la nouvelle saison du Ballet de l’Opéra de Paris.
Un programme porté par une musicalité des corps et une contemporanéité dont les danseurs de la compagnie parisienne se sont appropriés le vocabulaire et l’esthétique dans un geste aussi enlevé que maîtrisé.
On est accueilli en préambule de la soirée par des figurants habillés en ouvreurs et qui font naître dans les espaces public du Palais Garnier les propositions de Tino Sehgal, artiste conceptuel, à travers des séquences chorégraphiées dont l’adresse aux visiteurs se veut interpéllative, ludique et communicative.
La soirée se poursuit avec « In Creases » du jeune prodige Justin Peck sur la musique hypnotique de Philip Glass. A partir d’une variation arithmétique dans laquelle le chorégraphe articule ses huit danseurs, la chorégraphie imprime une figure abstraite à chaque mouvement ou attitude. Le groupe au diapason jouant alors avec sa configuration collective ou individuelle ainsi que son énergie dans une osmose parfaite.
Puis s’enchaine la partition de William Forsythe où le chorégraphe offre toute la mesure et l’étendue de son art emprunt d’un vocabulaire classique mais qu’il n’a eu cesse de déconstruire pour en déjouer les codes préétablis et l’ouvrir entre rupture, déséquilibre, virtuosité et dynamique organique du corps, à une esthétique réappropriée. « Blake Works I » se part d’une composition du jeune compositeur de la scène indé anglaise James Blake avec lequel Forsythe travaille pour la première fois.
[…] la chorégraphe canadienne Crystal Pite impressionne […]
Ainsi, sur une musique électro minimaliste aux influences pop/soul, les vingt solistes libérés font exploser la frontière entre gestuelle classique et rythmique propre au dancefloor dans le pur esprit forsythien et ces possibilités débusquées et infinies du corps dansant.
Après l’entracte on découvre la chorégraphe canadienne Crystal Pite, qui fut élève de William Forsythe au Ballet de Frankfort, et dont l’invitation pour la première fois à l’Opéra de Paris impressionne avec sa création « The Season’s Canon ».
Un oeuvre magistrale pour 54 danseurs sur les Quatre Saisons de Vivaldi en version revisitée par Max Richter, à l’abri d’une chorégraphie organique et d’une intensité inouïe où le rituel d’une communauté humaine se charge d’une danse tellurique aux prises avec les éléments/phénomènes déclinant chaque saison.
Où les danseurs, en pantalon de treillis et torse-nus, le cou tatoué d’une minerve colorée en vert, embrassent le monde naturel et ses mystères dans une chaîne de mouvements, les liant les uns aux autres, et une tension dramaturgique, le tout emmené par la cheftaine et royale Marie-Agnès Gillot.
Le programme s’achève comme il commencé avec Tino Seghal et une pièce sans titre sur une musique de Ari Benjamin Meyers, interprétée en live par sept musiciens dans la fosse. Où la bande son se fait le chorégraphe de jeux de lumière, des rideaux de scène en liberté et des danseurs dispersés dans la salle en prise direct avec les spectateurs.
Dates : du 26 septembre au 9 octobre 2016 l Lieu : Au Palais Garnier (Paris)
Chorégraphes : Justin Peck – William Forsythe – Crystal Pite – Tino Sehgal