Ouragan : quand le vent nous souffle son histoire, une sacrée secousse !
Il a fallu 3 réalisateurs, Cyril Barbançon, Andy Byatt et Jacqueline Farmer, ainsi que la participation de la NASA pour réaliser Ouragan. Le documentaire, en salle le 8 juin, est une immersion à l’intérieur de ce phénomène naturel dévastateur.
L’ouragan que nous suivrons pendant 1h30, se nomme Lucy. Personnifié, il possède un nom et une voix, celle du narrateur qui nous éclairera tout le long du film. Il a une histoire aussi : d’abord tempête de sable au Sénégal, il grossit pour se transformer en ouragan. A Porto Rico, il fait ses premières victimes puis il grossit encore pour dévaster le sud de Cuba et enfin traverse la Louisiane avant de disparaitre. Au plus fort de sa puissance, ses vents soufflent à 240 km/h avec des rafales atteignant 270 km/h. Il inonde les terres sur son passage.
Alors qu’aux premières minutes du film, l’inquiétude pointe : projet hybride, croisement d’un documentaire animalier et de prévisions météorologiques, on prévoit de s’ennuyer mais lorsque la tempête éclate, on est ahuri. La violence et la puissance ont toujours séduit l’homme. Et derrière ces images, se cache une prouesse technique et humaine ! A partir de l’idée folle d’observer ce monstre de l’intérieur, l’équipe du film a fait route avec lui à travers douze pays sur trois continents. Transportées dans l’œil de l’ouragan sous des housses imperméables, les caméras 3D ont filmé la forêt caribéenne, les récifs coralliens, les côtes cubaines en plein tourment. Un tournage qui s’étale sur 4 ans.
L’utilisation de la 3D amplifie la puissance des images et favorise la plongée dans l’ouragan. Pour un peu, on en sentirait les bourrasques. Elle met également en valeur une nature sauvage et malmenée habilement capturée par une variation de plans serrés et élargis : paysages et « zooms animaliers ».
La force du documentaire réside dans son parti-pris : « Je serai le monstre si je n’étais la merveille ». Et tout est dit. Les plans post-ouragans s’enchainent : animaux déchiquetés, maisons éventrées, hommes désarmés et pourtant, il n’y a nulle accusation mais de l’admiration et de la résilience face à une telle puissance brute. Les caméras se posent avec douceur sur ce cataclysme qui soulève la mer et aplatit la terre. Le narrateur, qui n’est autre que Lucy, s’innocente avec emphase, trop d’emphase, « Je rends l’air respirable, la terre habitable et l’homme possible ». Lucy restaurerait un équilibre perturbé par l’homme. Ce film nous rappelle ce que nous sommes : pas grand-chose. Ce chiot à la dérive sur une planche de bois flottante, nous ne pouvons pas le sauver. Cette femme, courbée, le visage recouvert de ses mains, qui attend la fin de l’ouragan dans un préau, nous ne pouvons pas la consoler. Ouragan est dur parce qu’il ne dissimule pas la misère de ceux qui subissent, il échauffe notre impuissance et malgré tout, il exalte la beauté de l’ouragan. On s’y perd.L’homme et la nature : qui est le maître ? Justement, il y a les hommes aussi. Des hommes divisés face à ce phénomène. Dans un cockpit alors qu’il traverse le haut de l’ouragan, un pilote s’exclame « C’est une belle tempête ». En bas, ceux qui la subissent, impuissants, se désolent. « A un moment, je ne savais plus quoi faire, je me suis assis sur une pierre et j’ai pleuré » se dévoile un Cubain à la maison en ruine. Ceux qui l’observent l’admirent et ceux qui en souffrent la craignent. Et il y a aussi toutes ces petites mains qui tentent d’anticiper la trajectoire de Lucy et de mettre les populations à l’abri.
On est loin de l’action movie américain où une poignée de héros téméraires bravent l’ouragan pour sauver des innocents. Ce film est beaucoup plus exigeant et moins divertissant : il nous instruit, nous stupéfie et nous impose le respect. C’est un pari osé que de présenter au public une force qui le surpasse. Tragique, impressionnant et beau tout simplement, il mérite le détour des spectateurs avisés qui ne sont pas là que pour se vider l’esprit !
Vous pouvez lire le livre : Ouragan, l’Odyssée d’un vent de Jacqueline Farmer, Jean-Marc Hovasse et Emmanuelle Martin, publié aux éditions Actes Sud Junior, (16 €)
Le film raconte le voyage de 15 000 km du phénomène climatique le plus dévastateur sur notre planète : l’ouragan. Force à la fois destructrice et indispensable à l’équilibre de la vie sur Terre. Son existence est brève mais dramatique : né en Afrique, il grandit au-dessus de l’Atlantique et meurt un mois plus tard en Amérique. Les survivants se confient. Leurs vies sont dévastées, jeunes et anciens livrent leurs peurs, et pourtant acceptent leurs pertes. Avec un regard qui passe du divin au terrestre, l’ouragan brise les équilibres, mais il ramène la lumière.
Sortie : le 8 juin 2016
Durée : 1h23
Réalisateur : Cyril Barbançon, Andy Byatt et Jacqueline Farmer
Avec : Romane Bohringer
Genre : Documentaire
Super article (y)