The Visit – une rencontre extraterrestre : que dire aux aliens ?
Que se passerait-il si des extraterrestres se posaient sur Terre ? Une question qui fait toujours verser beaucoup d’encre aux auteurs de science-fiction, mais que Michael Madsen décide de prendre au pied de la lettre avec The Visit. Concrètement, quelles sont les réactions de la communauté humaine ? Représentants de l’ONU, scientifiques astronomes ou biologistes répondent très sérieusement aux caméras de ce documentaire éclairant, mais toujours très occidental.
Sortie : le 4 novembre 2015
Durée : 1h23
Réalisateur : Michael Madsen
Avec : Chris Welsh (ingénieur spatial, International Space University), Christopher McKay (astrobiologiste à la NASA), Jacques Arnould (chargé de mission pour les questions éthiques au CNES)
Le postulat est simple: les extraterrestres débarquent sur Terre. Que faire? Comment leur parler? Que leur transmettre? Comment leur expliquer l’espèce humaine? Sommes-nous menacés? Mêlant documentaire et fiction, The Visit interroge spécialistes, scientifiques, astronautes, philosophes, militaires et politiciens, tandis que Chris Welch se prête au jeu et enfile sa combinaison pour pénétrer dans ce qui pourrait être le vaisseau spatial.
A première vue, le défilé d’interviews en plan fixe de personnes aux fonctions très sérieuses peut effrayer. Mais rassurez-vous, il n’en est rien. Michael Madsen est animé d’un vrai sens du cinéma (du spectacle, diront certains), et sait dépoussiérer le documentaire. Des plans originaux et esthétiquement réussis viennent illustrer les paroles des intervenants : le monde humain et son activité quotidienne se fige, fuit au ralenti, etc. La musique de The Visit, très signifiante, rivalise avec les meilleurs blockbusters de science-fiction, et s’autorise quelques clins d’œil aux classiques du genre. Le tout est ficelé dans une narration bien trouvée, où la caméra est souvent l’œil de l’alien. « Vous êtes une forme de vie différente de la nôtre« , déclare gravement Christopher McKay, astrobiologiste, face caméra.
Les intervenants de The Visit eux-mêmes se muent en acteurs, jouant le jeu de la vraisemblance, et non de la banale explication pédagogique. On observe alors une ancienne porte-parole du gouvernement britannique et un communiquant de l’ONU élaborer le message destiné à expliquer la situation à la population humaine. Quels mots employer ? « Disons que nous maîtrisons la situation. Quoique… est-ce vraiment le cas ? Mais il faut rassurer pour éviter les mouvements de panique. » Un questionnement pratique essentiel, d’autant plus lorsque l’on apprend que l’ONU n’a abordé le sujet de l’éventualité d’une arrivée extraterrestre qu’une seule fois.
[L]e point central du film est bien […] dans le questionnement de l’humanité.
Poussant plus loin la mise en situation, Chris Welch, ingénieur spatial, se porte volontaire pour être le premier explorateur du vaisseau extraterrestre. Il a imaginé plusieurs possibilités en préparant le film, retenant finalement celle qui mettait en doute les certitudes humaines de la vérité.
Car le point central du film est bien là, dans le questionnement de l’humanité. Dans Into Eternity, son précédent documentaire, Michael Madsen se voulait rassurant et se demandait sur quoi nous pouvions asseoir notre confiance en notre propre espèce. Ici, il se demande ce qu’est l’humain. Un avocat venu expliquer la nécessité de fonder une loi commune pour faire cohabiter l’Homme et l’Alien évoque la morale : est-elle spécifiquement humaine ?
L’accent est mis sur l’inconnu, qui attire autant qu’il effraie l’espèce humaine, réveillant les fantômes de la colonisation. « Inévitablement, on a peur que l’on nous fasse ce que nous avons fait à d’autres. » Nous ? Oui, nous les Européens. Le réalisateur danois se sent de culture européenne, et prend donc le parti de traiter la question du point de vue de l’homme occidental. Qu’il veuille restreindre le champs des intervenants spécialistes est compréhensible, et en l’occurrence on s’intéresse à la réaction européenne face à cette situation. Mais définir l’humanité, caractériser l’essence de l’Homme et expliquer son existence avec une voix uniformément occidentale est insensé.