Furieusement vibrant.
L’année 2024 restera incontestablement connue comme étant celle de la renaissance du cinéma post-COVID avec des chiffres toujours plus hauts et une qualité retrouvée entre maestros en forme et wannabe famous inspirés. Auraient pu faire parti de ce TOP 10 décidément trop étriqué : le fantasmagorique testament de Mister Coppola, Megalopolis, la sensationnelle partition du trio Audiard/Gascon/Saldana dans Emilia Perez, l’odyssée éprouvante inoubliable de Matteo Garrone, Moi, capitaine, le succulent thriller papale Conclave, d’Edward Berger, l’anxiogène Longlegs (ou la révélation du talent fou de Osgood Perkins), Dans la peau de Blanche Houellebecq, délirante comédie du protéiforme Guillaume Nicloux sous les alizées de Gwadada, ou encore Love lies bleeding, Strange Darling, Borgo et Kinds of kindness.
10 – Rebel Ridge (Jeremy Saulnier – USA).
L’uppercut qu’on n’avait pas vu venir ressemble fortement à celui qu’Aaron Pierre distribue généreusement dans l’impressionnant polar de Jeremy Saulnier, Rebel Ridge. Rien ne laissait présager une telle générosité dans l’effort pour cette production Netflix qui aurait pu ressembler à la flopée de photocopies que nous sortent toutes les plateformes possibles. Mais c’était sans compter sur un Saulnier ultra inspiré avec les mots et les images, un Aaron Pierre qui s’installe d’emblée comme l’un des plus grand action man de sa génération, et une armée de seconds couteaux très aiguisés (Don Johnson, AnnaSophia Robb). Le meilleur western de 2024 !
9 – King’s land (Nicolaj Arcel – Danemark).
Où s’arrêtera la quête de charisme dans le 7e Art de Mads Mikkelsen ? Déjà inscrit dans la peau de quelques personnages légendaires, ce n’est pas ce nouveau rôle sous les caméras de son compatriote, Nicolaj Arcel, qui ternira son mythe, bien au contraire. Qui d’autre que lui et son visage ultra buriné pour porter toute la résilience et souffrir avec dignité en silence face à l’adversité du nord extrême et ses égos. L’antithèse du lyrique et inspiré Monte-Cristo pour un résultat qui imprimera plus longuement les rétines averties.
8 – Terrifier 3 (Damien Leone – USA).
Le 3e volet des mésaventures de Art le clown porte enfin celui-ci vers les sommets grâce à une écriture qui a gagné en tout : constance, humour et esthétisme. Damien Leone convoque depuis 3 films déjà toute une inspiration issue des films bis et Z les plus retords des années 80/90 pour en faire un mythe : celui du meilleur boogeyman du XXIe siècle. Dans un océan d’immondices et de no limit, Leone fait ressurgir l’esprit Chaplinus de ce personnage terrible qui ne prononce jamais un mot et qui jouit en démystifiant les plus grands mythes (pauvre Papa Noël). Jubilatoire et terriblement transgressif.
7 – Challengers (Luca Guadagnino – Italie).
Cette année, mon plan à 3 à moi, c’est Luca Guadagnino/Trent Reznor/Atticus Ross. Véritable trio infernal qui dynamite le traditionnel jeu dangereux plan-plan du meilleur ami qui tombe amoureux de la copine de. D’une photographie démentielle signée Sayombhu Mukdeeprom (mister Weerasethakul, excusez du peu), l’italien impose l’idée de génie d’une agressive musique electro inspirée pour illustrer les plans parmi les plus fous réalisés sur le monde du tennis. Saupoudrez le tout du meilleur rôle des 3 acteurs principaux : Zendaya, Josh O’Connor et Mike Feist, et vous optiendrez les vrais Challengers de 2024.
6 – Le cercle des neiges (Juan Antonio Bayona – Argentine).
En voilà un thème un peu trop dans l’actualité du moment avec cette terrible loi des séries des crashs aériens actuels … Ici, on a l’impression que Bayona nous a broyé la nuque, fracassé le tibia et l’humérus en simultané, tant le réalisme distillé par la précision de l’image, du son et des corps brisés de son accident d’avion est cartésien. Le temps de reprendre notre souffle et nous voilà plongée dans le cœur du mal andin : froid, faim, meurtrissure. Rarement le désespoir n’aura été aussi bien transmis à l’écran, convoquant le pire de notre humanité. Le survival ultime de 2024 qui aurait mérité une expérience en salle obscure.
5 – Dune 2 (Denis Villeneuve – USA).
Dune 2, ou l’art de relativiser une déception. Passé l’effet de surprise d’une première plongée magistrale sur Arakis déjà sous la houlette de Denis Villeneuve, il fallait maintenant nous en mettre à nouveau plein les yeux. Et c’est souvent le cas ici : plus de vers géants, plus de désert à la beauté épique, plus de batailles et d’enjeux. Mais on reste indubitablement sur notre faim comme tout second épisode qui se veut intermédiaire. Cela reste cependant largement suffisant pour écraser 95% des blockbusters de l’année (Coucou Ridley) et nous offrir de nouveaux moments inoubliables toujours sous les tamtams de Hans Zimmer.
4 – TRAP (M. Night Shyamalan – USA).
Le tour de passe-passe de l’année est signé M. Night Shyamalan. Cela faisait longtemps diront certains. Mais il ne s’agit pas de tous ceux que l’on voit autour des mésaventures surréalistes du serial killer campé avec gourmandise et générosité par le revenant Josh Hartnett (quelle renaissance !). Le plus grand TRAP de 2024 est le jeu constant du réalisateur avec son spectateur. Le show dans le show. Couleur annoncée dès les premières minutes, péripéties teintées d’humour noirs et empathie pour l’une des plus belles ordures de l’année, voici le film qui murira le mieux dans votre esprit si vous êtes joueur. Ou pas. L’ultime idée de la mise en abîme.
3 – The Substance (Coralie Fargeat – France).
Coralie Fargeat au sommet d’Hollywood ! Quelle pépite de pop culture et de cinéma que The Substance, concept de régénérescence physique et de body horror-porn que n’aurait pas renié le vénéré David Cronenberg. Mais ici, la réalisatrice française pousse tous les curseurs au max. Des couleurs intenses, de l’esthétique et du montage exagérément clipesque, la renaissance de Demi Moore, l’avènement définitif de Margaret Qualley et ce finish totalement WTF : vous deviendrez aussi vite accro à la Substance, croyez moi.
2 – Anora (Sean Baker – USA).
Ma super héroïne de l’année n’a pas de pouvoir (enfin pas exactement ceux que l’on croit), mais une personnalité de feu et une gouaille lumineuse. Bienvenue à toi, Mikey Madison dans le grand monde du cinéma. Et quelle entrée fracassante à l’image d’Ani-Anora, cette Pretty Woman du XXIe qu’elle campe avec la générosité qui incombe au cinéma du surdoué, Sean Baker. Dans la veine de son déjà survitaminé Tangerine, le nouveau pape du ciné Indie US nous concocte un film hybride à l’humeur et à l’humour ultra contagieux pour que triomphe le vrai Amour, le tout sous fond de lutte des classes. Pépite absolue.
1 – Furiosa : Une saga Mad Max (George Miller – Australie).
Une nouvelle déflagration dans le Wasteland tout droit sorti de l’esprit déboussolant de notre Ozzy préféré, j’ai nommé George Miller. Tout y est aussi fou que sur la Fury Road, mais cette fois, on y ajoute une dimension herculéenne assez fascinante à travers le destin de Furiosa, campée avec rage et délectation par la déjà géante Anya Taylor-Joy. La grandeur spectrale de son ouverture nous laissait à peine entrevoir la folie qui allait parcourir le reste du film. Notre classement offre une véritable revanche à ce film boudé par le Box Office, à cette exceptionnelle héroïne, ainsi qu’à la virtuosité de sa mise en scène. Encore plus de poussières, de suies et de faya, George !
Mettre Trap devant Dune, c’est démontrer son ignorance de ce qui fait qu’un film est amusant ou génial. Dune est génial, Trap n’était qu’amusant.