Les 8 Salopards, film le plus abouti de Quentin Tarantino

Les 8 Salopards
Les 8 salopards : Photo Jennifer Jason Leigh, Kurt Russell, Tim Roth ©2015 The Weinstein Company. All Rights Reserved.

Les 8 Salopards, film le plus abouti de Quentin Tarantino

Et si le western était le genre filmique qui correspondait le mieux au cinéma de Quentin Tarantino ? On le sait depuis son tout premier long métrage, Reservoir Dogs, le surdoué américain adore le duel, les dialogues, le suspens et par dessus tout, le jeu d’acteur. Pulp Fiction et Kill Bill, que beaucoup considèrent comme ses meilleures oeuvres, possèdent beaucoup de codes inhérents au genre, le diptyque de la Mariée allant jusqu’à allier la simplicité de son scénario à la virtuosité mesquine qui entoure l’esprit de vengeance qui colle aux bottes et aux Stetsons du grand Ouest.

Huitième réalisation de Tarantino, Les 8 salopards semble être la quintessence de son cinéma, son âge de maturité, sa Madeleine de Proust. Le bonhomme se veut moins éparpillé, toujours aussi fendard, moins grand-guignolesque (quoique), plus ramassé et précis. Pour cela, il s’entoure de la fine fleur de son cinéma : Kurt Russell, Tim Roth, Samuel L.Jackson, Michael Madsen, tous de sacrées gueules d’acteur devenus des acteurs sacrés pour toute une génération cinéphile des années 80-90. Ces derniers sont comme des poissons dans l’eau, ne semblent avoir pris aucune ride ou presque et se retrouvent aussi affutés que lors de leurs plus belles heures Hollywoodiennes. Ils sont tous prêts pour le huis clos terrible que leur a concocté Quentin « Agatha Christie » Tarantino.

Un jeu de massacre d’une efficacité démentielle (…)

Un jeu de massacre d’une efficacité démentielle qui rappelle à quel point le réalisateur adore les jeux de piste, de suspens et de tension. On se rappelle encore avec quelle efficacité dévastatrice, le quasi-inconnu Autrichien Christoph Waltz avait fait son entrée dans le panthéon des bad guys, lors d’un face à face intenable en huis-clos avec Denis Ménochet en introduction d’Inglourious Basterds. Verbeux et crispant à souhait. Cette séquence peut d’ailleurs se voir comme une répétition des 8 salopards tant Tarantino va pousser à l’extrême ce processus pendant les 2h45 du film.

Si certains y verront un long maniérisme sans fin, poseur, grossier et machiste (Qu’est ce qu’elle ramasse la pauvre Jennifer Jason Leigh ! Elle n’a pas fait le voyage pour rien comme dirait l’autre), d’autres ne pourront que jubiler devant ce spectacle gargantuesque et minimaliste à la fois. Terminé les grands espaces après un quart d’heure de film – et encore on était loin de la canicule de l’Arizona – avec ces montagnes du Wyoming et son blizzard contraignant deux chasseurs de prime à faire escale dans la gargote du coin. Eux ce sont Russell et Jackson, aussi vifs et acérés qu’à leurs 20 ans. Amers, sarcastiques, méfiants et bourrus, ils pourraient parfaitement être les arrières grand-parents des gangsters de Reservoir Dogs. Le contexte historique en plus.

Les 8 Salopards
Les 8 salopards : Photo Kurt Russell, Samuel L. Jackson ©2015 The Weinstein Company. All Rights Reserved.

Celui-ci est d’une redoutable efficacité pour mettre un bon coup de projecteur sur le personnage de Samuel L.Jackson, sans le rôle du Black de service. Sauf que cette fois, suivant la pente amorcée par Django Unchained, le Black est au coeur de tous les sujets qui fâchent post Guerre de Sécession. L’occasion pour le cinéaste de régler quelques comptes avec son confrère Spike Lee autour de l’emploi du mot « Nigger », terme plutôt tabou outre-Atlantique. Le face à face verbal entre Jackson et Bruce Dern, parfait en ex-général des Sudistes, est d’ailleurs le moment le plus délicieux du film de par sa grossièreté, son rythme, son jeu de regard et évidemment son côté politiquement incorrect poussé au maximum. Du pur et dur Tarantino.

[S]on film le plus maitrisé et équilibré (…)

On rigole à gorge déployée avant de se crisper quand les détonations fusent quelques instants plus tard. Ce serait presque une recette de spaghetti. On parle de western évidemment, malgré les teintes rougeâtres donc se parent régulièrement les murs et visages de nos personnages. Oui, on a l’impression d’être aux plus belles heures du western à la Sergio Leone. Même si le débit mitraillette de Jackson contraste avec le mutisme charismatique de Eastwood, le résultat est le même : scène d’exposition hilarante et tordue succède à duel sans merci. Le tout souligné par la magnifique partition à la fois sombre et onirique de maestro Ennio Morricone, dont, fait extraordinaire, c’est la première participation à une BO de Tarantino, et ce malgré l’emprunt régulier de musique pour ses films précédents.

Vous l’aurez donc compris, ce huitième long-métrage de Quentin Tarantino apparait définitivement comme son film le plus maitrisé et équilibré, que ce soit sur le plan scénaristique, visuel, le jeu d’acteurs et le rythme malgré ses longueurs. Les partitions aussi virtuoses sont devenues tellement rares dans le paysage audiovisuel américain qu’on ne peut que saluer une telle performance. Il offre ainsi la part belle à toute une brochette d’oubliés du cinéma, ainsi qu’à d’éternels seconds couteaux (Le meilleur rôle de Samuel L.Jackson, de loin, et la renaissance de Jennifer Jason Leigh), sans oublier le wannabe Walton Goggins, scandaleusement démentiel en sorte de petite teigne croisement entre Joe Dalton et Tuco. Boudé par les Oscars, l’enfant terrible d’Hollywood continue ainsi son chemin entre irrévérence sourde et maestria artistique pour le plus grand bonheur des amoureux d’un cinéma qui claque.

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Les 8 Salopards Quelques années après la Guerre de Sécession, le chasseur de primes John Ruth, dit Le Bourreau, fait route vers Red Rock, où il conduit sa prisonnière Daisy Domergue se faire pendre. Sur leur route, ils rencontrent le Major Marquis Warren, un ancien soldat lui aussi devenu chasseur de primes, et Chris Mannix, le nouveau shérif de Red Rock. Surpris par le blizzard, ils trouvent refuge dans une auberge au milieu des montagnes, où ils sont accueillis par quatre personnages énigmatiques : le confédéré, le mexicain, le cowboy et le court-sur-pattes. Alors que la tempête s’abat au-dessus du massif, l’auberge va abriter une série de tromperies et de trahisons. L’un de ces huit salopards n’est pas celui qu’il prétend être ; il y a fort à parier que tout le monde ne sortira pas vivant de l’auberge de Minnie…

Sortie : le 6 janvier 2016
Durée : 2h47
Réalisateur : Quentin Tarantino
Avec :  Samuel L. Jackson, Kurt Russell, Jennifer Jason Leigh, Walton Goggins, Demian Bichir, Michael Madsen, Tim Roth, Bruce Dern
Genre : Western

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NOS NOTES ...
Originalité
Scénario
Réalisation
Jeu des acteurs
Jean-Marie Siousarram
Manipulateur de mots pour la presse web depuis quelques années. Cinéphage compulsif, féru de culture en tout genre, de voyages, de musique électronique, de foot. Rejeton de Chaplin & Hitchcock.
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