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Amaury Jacquet

Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.

Émilie Charriot en résonance singulière et intense avec « L’Amante anglaise »

Avec "L’Amante anglaise", Marguerite Duras revisite un meurtre qui a eu lieu à la fin des années 1940. Par le biais d’un double interrogatoire, d’un double dialogue, elle creuse l’idée du mystère, de l’incompréhension, de la perdition d’une âme, au regard de l’acte criminel. Et elle nous place face à une énigme que l’on essaie de comprendre. Elle use d’une forme de suspens, tout en déployant les grandes thématiques de son écriture, comme la folie et l’amour, qui sont les deux pierres angulaires de "L’Amante anglaise".

Le Misanthrope enlevé et aiguisé de Georges Lavaudant

Georges Lavaudant s’empare pour la première fois et avec brio, de la langue de Molière. Il l’inscrit dans un espace-temps intemporel, au plus près de ce discours sur la raison et la passion, qui n’en finit pas de consumer les âmes. La vanité, le jeu des influences, les faux-semblants, tout comme la perfidie des courtisans sont au cœur de cette pièce. Les passions humaines qui s’y déchaînent ne cessent de nous offrir un miroir grossissant de notre propre et petite condition.

« Pelléas et Mélisande » : le clair-obscur puissant de Wajdi Mouawad à l’opéra Bastille

Wajdi Mouawad, l’homme des grandes épopées théâtrales, le tisserand des silences et des fracas, s’attaque à l’opéra Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck, porté par la musique sensorielle de Debussy. Un choix audacieux, presque une évidence pour celui qui a fait des non-dits et des blessures invisibles la matière première de son art. Mais ici, dans ce chef-d’œuvre symboliste où les mots sont des ombres et les sentiments des abîmes, Mouawad se confronte à une partition scénique aussi exigeante que la partition musicale. Et le résultat est un spectacle fascinant au plus près de la dimension allégorique, onirique et ténébreuse de l’œuvre.

« Trahisons » ou le triangle de la menace selon Pinter

"Trahisons" reprend l’équation du théâtre bourgeois – le mari, la femme, l’amant –, mais la déconstruit grâce à son artifice narratif pour révéler l’essence, la profondeur et les méandres de ce lien. L’intrigue fait intervenir Emma (Marie Kauffmann), et Jerry (Swann Arlaud), amants pendant sept ans, qui se retrouvent deux ans après leur séparation. Puis Robert (Marc Arnaud), mari de l’une et meilleur ami de l’autre.

« L’Intruse et les Aveugles » : les deux diamants noirs de Tommy Milliot

Tommy Milliot relève le défi de mettre en scène deux pièces emblématiques de Maurice Maeterlinck : "L'Intruse" et "Les Aveugles". Il s’empare à l’abri d’un geste fort de la langue de Maeterlinck (1862-1949), dont les personnages semblent toujours en proie à une force invisible et mystérieuse. En faisant le choix d'un minimalisme tranchant et d’une épure qui confine au vertige, Tommy Milliot, le nouveau directeur du Centre dramatique de Besançon, nous plonge au cœur d’une exploration humaine, si propre au symboliste belge, et aux prises avec les forces incontrôlables et sans appel du destin.

« Les Idoles » de Christophe Honoré ou l’éternelle inspiration

l y a eu "Plaire, aimer et courir vite" au cinéma, puis la publication du récit autobiographique "Ton père". Christophe Honoré termine son triptyque sur l’homosexualité en ressuscitant au plateau la génération sida de ses idoles parties trop vite. Et les revoilà donc pour un retour en arrière et au présent, un retour sur images, sous les traits d’actrices et acteurs. Une déclaration d’amour, un regret poignant, un exercice drôle et irrévérencieux selon l’art et la manière de Christophe Honoré. Ces années-là, c’était les années sida : on le découvre, il se propage, on en porte les stigmates, on en meurt. Encore étudiant, Christophe Honoré quitte Rennes pour Paris où il comprend que tous ceux qu’il aime, qu’il admire, sont partis : les dramaturges Jean-Luc Lagarce et Bernard-Marie Koltès, le chorégraphe Dominique Bagouet, le romancier Hervé Guibert, le critique de cinéma Serge Daney, les réalisateurs Cyril Collard et Jacques Demy. Tous étaient homosexuels.

« Juste la fin du monde » : l’impossible fin de partie de Jean-Luc Lagarce au théâtre de l’Atelier

Avec cette pièce chorale « Juste la fin du monde » dans une mise en scène de Michel Raskine, il fait son entrée en 2008 au répertoire de la Comédie-Française. Aujourd’hui, Johanny Bert revient à cette pièce et fait entendre avec justesse et naturel, cette intranquillité du monde, si propre au dramaturge, et que focalise à travers le prisme familial, toutes ses incompréhensions, ses tensions, ses conflits, ses douleurs, ses replis, mais aussi sa force vitale, aussi maladroite qu’impulsive.

Notre Sélection

« I will survive » : rire nerveux et malaise garanti

Avec I Will Survive, Les Chiens de Navarre rappellent une vérité simple : quand la réalité devient trop absurde pour être racontée, il ne reste plus qu’à l’exagérer pour qu’elle redevienne audible. Jean-Christophe Meurisse l’a bien compris : l’outrance n’est pas une facilité, mais un outil — une loupe déformante pour mieux scruter les recoins les plus gênants de la société française. Et c’est justement parce qu’il observe si finement qu’il grossit si fort.

Une École de danse d’une troublante modernité à la Comédie-Française

Il arrive que le théâtre ressuscite des œuvres qu’on croyait promises à l’oubli. Avec "L’École de danse", Clément Hervieu-Léger réalise précisément cela : redonner souffle à une comédie que Goldoni retira de l’affiche après deux malheureuses représentations. Un naufrage originel, devenu aujourd’hui matière à renaissance.