Tabac rouge de James Thiérrée, à Paris

Tabac Rouge 478 A4 rgb - Copie

Théâtre de la Ville du 18 février au 1 mars 2014

Après “Raoul”, un solo introspectif qui nous plongeait dans l’histoire d’un homme face à lui même et à son imaginaire dont on suivait l’épopée initiatique et fantasmagorique qui l’ouvrait au monde et à sa renaissance, James Thiérrée revient avec une nouvelle création « Tabac rouge ».

Il reprend le rôle qu’il avait confié à Denis Lavant lors de sa création et réinvesti donc le plateau avec six danseuses, un danseur circassien, deux contorsionnistes pour un « chorédrame » baroque et dont chaque figure, chaque vision, chaque sonorité, renvoie à son univers protéiforme et toujours ardent.

[pull_quote_left]Une traversée crépusculaire où la matière s’incarne dans un imparable feu sensoriel et visuel.[/pull_quote_left]

Une cité étrange, entre attraction/répulsion où un homme de pouvoir est aux prises avec des sujets dans un mouvement chaotique et contradictoire pour un spectacle hybride entre théâtre et danse .

Tabac Rouge 2024 A4 rgb - Copie

Le rideau s’ouvre sur une machinerie post-apocalyptique faite de tubes métalliques, d’un bureau dictatorial sur roulettes  sorti d’un autre monde, de câbles débordant des cintres et d’un assemblage mobile de miroirs dépolis. Ces derniers déstructurant l’espace et les interprètes comme pour imprimer la transformation et l’élan à la dramaturgie fragmentaire dont le dispositif scénique constitue la pièce maîtresse. Au centre de ce décor monumental et mouvant est assis un homme qui règne sur une communauté dont les corps asservis s’animent sous son emprise tyrannique où chacun de ses actes influe sur l’environnement ainsi que sur son propre enfermement.

Une société secrète dans laquelle deux personnages mènent le jeu. L’un jeune à qui Thiérrée résiste et prête sa gestuelle et ses mimiques burlesques. Tandis que l’autre regard désabusé, désillusionné, à la présence solide et facétieuse offre une perdition kafkaïenne. Un monarque face à son pouvoir où les rôles dominés/dominant s’inversent dans une dépendance mutuelle et confusionnelle.

Laquelle donne lieu à un incroyable chassé-croisé virevoltant de corps élastiques, mutations hallucinantes, courses effrénées au milieu d’une cité organique qui s’ébranle, se brise et s’immobilise. Pour un retour au calme puis une reprise des hostilités jusqu’à l’assaut final qui voit le maître libéré de son ascendance dominatrice et son miroir dantesque se désintégrer dans une scène marquante.

[pull_quote_center]un « chorédrame » baroque et dont chaque figure, chaque vision, chaque sonorité, renvoie à l’univers protéiforme et toujours ardent de l’artiste.[/pull_quote_center]

Le tout sur une musique de Pergolese à Caetano Veloso en passant par Matthieu Chedid qui rythme les variations multiples de ce songe éveillé.

Une traversée crépusculaire où la matière s’incarne dans un imparable feu sensoriel et visuel.

Amaury Jacquet
Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.

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