Défense de nourrir les vieux, un humour so british (Grasset)
Défense de nourrir les vieux est un titre hors du commun et promet un roman également hors norme. Ce qui est tout à fait le cas. Adam Biles, à travers son premier roman, nous invite à réfléchir sur la façon dont nous traitons nos vieux, dans nos sociétés occidentales.
Dotty se retrouve dans une maison de retraite, pas ordinaire. Les Chênes verts, là où son mari a été installé il y a déjà quelques mois. Il s’est mis à perdre la boule, subitement, et à devenir violent. Aucun autre choix possible. Une maison de retraite s’imposait. D’après le catalogue, les Chênes verts respire le bonheur. Les soignants sont appelés les « Amis-soignants ».
Dès son arrivée, Dotty a dû remettre sa montre au directeur. C’est la loi de la maison. Pas de montre, pas d’heure. Elle va devoir s’habituer aux pensionnaires des Chênes verts, tous plus originaux les uns que les autres. Leur seul point commun : être vieux, et « enfermés » dans cette maison.
Si avec Défense de nourrir les vieux, Adam Biles parle beaucoup des pensionnaires, ou plutôt les fait parler, il faut rester bien accroché pour tenter de les comprendre. Un monde à part, le monde des vieux. Un monde de fous ? Pas si sûr ! Un monde capable de se révolter, ça c’est sûr !
Car de la même façon, il va s’attarder au personnel de cette maison de retraite. Et franchement, ils ne sont pas enviables et ressemblent à s’y méprendre aux vieux ! Ils semblent nager dans un tout autre monde que le nôtre.
Qui est le plus fou ? Quel est le sens de cette immense mise en scène macabre ? Une sorte d’ « espace game » géant, avec des scènes très absurdes, où les vieux nous baladent et nous perdent… Où les vieux restent les plus forts.
Adam Biles est un tout jeune auteur et pourtant avec Défense de nourrir les vieux, il appuie là où ça fait mal. Toujours avec un humour très british, mais son message est clair et nous interpelle grandement.
À la maison de retraite des Chênes Verts, il est interdit de posséder une montre. Les familles ne sont pas autorisées à apporter de la nourriture, et il est fortement conseillé de baisser les yeux lorsque les aides-soignants arrivent pour l’inspection des dortoirs. On ne rigole pas avec le règlement, et encore moins avec la direction.
Quand Dorothy – la petite nouvelle, âgée de 74 ans – arrive devant le portail de l’établissement, elle comprend immédiatement que la situation est explosive. D’autant qu’après les dernières restrictions budgétaires, Tristan est nommé superviseur d’une équipe de deux autres aides-soignants. Son objectif : mater toute tentative de rébellion parmi les pensionnaires. Du côté de Dorothy et de ses nouveaux compagnons, c’est une évasion qui est en train de s’organiser, autour notamment du fantasque Capitaine Ruggles, persuadé d’être retenu en otage dans une prison nazie…
Dans la grande tradition de l’humour noir anglais, Adam Biles met en scène ses personnages dans des situations aussi drolatiques que dramatiques. Sans tabou, Défense de nourrir les vieux nous parle des frustrations, des espoirs, mais aussi des désirs de nos aînés. Un livre détonnant.