“L’École des femmes” sous le regard enlevé de Stéphane Braunschweig, en libre accès

“L’École des femmes” sous le regard enlevé de Stéphane Braunschweig
Photo de L’Ecole des femmes, de Molière, mise en scène Stéphane Braunschweig,© Simon Gosselin

“L’École des femmes” sous le regard enlevé de Stéphane Braunschweig en libre accès

La captation de « L’École des femmes », spectacle créé le 9 novembre 2018 à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, de Molière, mise en scène par Stéphane Braunschweig, est à voir à la fin de cet article.

Après Le Misanthrope et Tartuffe, Stéphane Braunschweig retrouvait l’œuvre de Molière avec cette comédie noire, explorant le dessein d’un homme qu’il le confine à une forme de folie dont le discours glaçant, fait écho avec la libération de la parole des femmes que nous connaissons aujourd’hui. Et dans le rôle de cet homme aussi troublant que tourmenté, Claude Duparfait se révèle prodigieux d’inventivité, incarnant à la fois toute l’angoisse et la drôlerie de la satire.

Nombreux sont les personnages masculins chez Molière qui, hantés par la peur des femmes, manifestent jalousie maladive, possessivité obsessionnelle et terreur d’être trompé. Arnolphe n’y échappe pas, pourfendeur invétéré du mariage et des maris cocus, il s’apprête pourtant à épouser la jeune Agnès.

Ayant pris soin de l’élever en total retrait du monde depuis sa tendre enfance, il pense ainsi se soustraire à ce qu’il appréhende le plus : sa peur des femmes, sa peur d’être cocu et la peur de son propre désir.

Or, de retour de voyage, il rencontre le jeune Horace qui, par un quiproquo, l’informe lui-même qu’il s’est épris de sa protégée. Agnès apprenant vite à l’école de l’amour !

Démon fatal

Dans cette farce cauchemardesque, si Molière fustige cette folie utopique qui trouve appui sur le pire obscurantisme religieux, les “Maximes du mariage” d’Arnolphe, il ne caricature pas pour autant son héros dont il donne aussi à voir les tourments douloureux qui habitent cet homme redoutant plus que tout la vieillesse qui se profile.

D’une franchise déconcertante quand il vante une “pédagogie de l’ignorance” pour les filles qui vont devenir des épouses dévouées, sachant prier Dieu, aimer leurs maris, “coudre et filer”.

Et Arnolphe souffre en effet sincèrement de l’échec rendu possible par le jeune courtisan de cet amour anthropophage qui le dévore, vivant ainsi entre fantasme et cauchemar.

Alors, pour la tirer des griffes de l’amour juvénile et de sa tentation, notre homme a un urgent besoin que sa prisonnière fasse preuve de “raison”. “Inutile, dit-elle, de me demander de la raison : je suis sotte”. C’est ainsi qu’elle lui échappe et que Molière affirme sa liberté émancipatrice et la reconnaissance de son propre désir.

Folie ravageuse d’un homme donc porté par un abus de pouvoir manifeste mais d’un redoutable comique où l’effroi de la situation finira par se retourner contre lui.

Dans une scénographie moderne de Stéphane Braunschweig qui joue sur le dedans et le dehors, l’objet du fantasme et son émancipation jusqu’à sa perte, la comédie explosive se déploie à merveille.

Claude Duparfait au sommet de son art

En costume-cravate, Arnolphe (Claude Duparfait) est un cadre dynamique qui va à la salle de sport pour s’entretenir et rester jeune tandis qu’Agnès (Suzanne Aubert) est cet objet de désirs protégé et jalousement gardé, derrière une vitre.

Claude Duparfait est ce personnage moliéresque par excellence, tour à tour grotesque, ridicule, effrayant et tourmenté, il se montre exceptionnel de virtuosité, aux prises sans relâche entre son désir contrarié et son besoin compulsif de tout vouloir contrôler.

Quant à Suzanne Aubert, elle est cette âme d’abord insondable et fragile puis qui s’émancipe de son pygmalion en quête d’elle-même et de son propre désir.

NOS NOTES ...
Originalité
Scénographie
Mise en scène
Jeu des acteurs
Amaury Jacquet
Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.
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