The Big Short, aux sources d’un krach financier planétaire

The Big Short le casse du siècle
The Big Short : le Casse du siècle : Photo Hamish Linklater, Jeffry Griffin, Jeremy Strong, Rafe Spall, Ryan Gosling ©Paramount Pictures. All Rights Reserved

The Big Short, aux sources d’un krach financier planétaire

En course pour les Oscars dans rien de moins que la catégorie reine de meilleur film, The Big Short mérite que l’on revienne sur ce qui fait son intérêt. Un casting 3 étoiles, un rythme trépidant, un humour cynique et un éclairage sans concessions sur une crise majeure. Celle qui a mis à terre l’économie mondiale en 2007.

Plutôt que de n’éclairer les consciences que de quelques spectateurs perdus devant un documentaire technico-abscons, Adam McKay choisit la satire et l’humour débridé pour accrocher l’attention. Pas sûr que cela suffise pour alerter sur l’impunité d’un monde de la finance sans véritable garde fou, mais cela produit un film délicieusement inimitable.

La crise des supprimes a ébranlé le monde de la finance en 2007. Rire d’une crise financière qui a mis à terre des millions de particuliers piégés par une soudaine et irréversible hausse des taux d’intérêts ? Les jetant à la rue et leur faisant perdre maisons et biens matériels ? Y-a-t-il meilleur moyen pour éveiller les consciences et aborder un sujet certes rébarbatif mais pourtant fort instructif sur l’opacité d’un monde financier qui joue le sort du monde dans ce qui ressemble à une partie de dés ? The Big Short réussit le pari fou de faire toucher du doigt les mécanismes d’un monde d’argent et de pouvoir que beaucoup ignorent. De ceux que les professionnels concernés préféreraient garder mystérieux pour ne pas attirer l’attention. Gagner des millions éveille autant la curiosité que la méfiance. The Big Short explique pourquoi les enjeux et les confortables primes ont créé un système pourri et corrompu.

[Un] film (…) immensément drôle

Pour débuter, un bémol. J’avoue quelques connaissances financières issues d’un parcours professionnel aux consonances régulièrement financières. A la projection presse en novembre dernier, nous étions 2 à rire aux éclats, le reste de l’assistance souriant aimablement. Le film est-il trop ésotérique pour toucher une vaste audience ? Comment rire devant un film qui vous perd en route en s’enfonçant dans une logique complexe et inaccessible ? Je n’ai pas vraiment de réponse à la question. Le film est immensément drôle car il décortique astucieusement les mécanismes ayant aboutis à la crise financière. Avec une tonne d’humour et le très gros feutre pour bien surligner ce qui a cloché. Hormis cette nuance initiale, le film est parfait en tous points.

Le montage de The Big Short est un modèle du genre. Adoptant des incrustations à l’écran très tendances avec des définitions, des symboles ou des commentaires, le film joue la pédagogie à fond. Une présentation d’abord financièrement littérale est répétée plusieurs fois avec des mots différents et des niveaux de lecture simplifiés. Quand l’acteur suppose comme un clin d’oeil au spectateur qu’il est certainement perdu, il invoque une tierce personne pour reformuler son propos. Et quel plaisir de voir Margot Robbie dans son bain ou Selena Gomez à la table d’un casino parler finance en toute décontraction. Comme si le sujet était simple comme bonjour. Pour convaincre qu’avec un peu d’attention il est possible de comprendre ce qu’il s’est vraiment passé. Car la compréhension est la première étape de la condamnation de ceux qui ont provoqué la crise.

Le titre français du film est « Le casse du siècle« . Aguicheur mais faux. The Big Short n’est pas une variante d’Ocean’s eleven et les personnages ne sont pas des braqueurs. Ils travaillent tous dans la finance et devinent avant tout le monde qu’une chute des valeurs est inévitable. Et ils parient contre le marché, imaginant qu’ils peuvent se faire une bonne dose de dollars le jour où le marché se retournera. Ce qui semble inéluctable est accueilli avec mépris et arrogance par ceux qui se remplissent quotidiennement les poches en amont de la crise. Ne dit-on pas « Quand le bâtiment va, tout va » ? L’immobilier aux Etats-Unis au début des années 2000 était une mine d’or. Les banques prêtaient à tout va à des particuliers prêts à acheter 2 voire 3 maisons pour profiter de l’euphorie. Sans être correctement informés qu’un taux variable peut doubler voire tripler le montant des remboursements pour finalement les ruiner en cas de retournement du marché… et patatras.

[U]n festival pétaradant de mimiques, de réparties et de situations ubuesques.

Les financiers sont incarnés par la crème des acteurs hollywoodiens actuels. Visez plutôt. Le bô gosse en chef Ryan Gosling, l’acteur radical prêt à perdre 30 kilos pour un rôle Christian Bale, le bô boss des années 90 et 2000 Brad Pitt et l’acteur comique qui creuse le sillon de la comédie dramatique depuis Foxcatcher : Steve Carrell. Une dream team qui donne une vraie valeur au film. Car ils rivalisent d’expressions drolatiques pendant 2h10. Et le fameux documentaire barbant sur un sujet financier devient un festival pétaradant de mimiques, de réparties et de situations ubuesques. Car si les protagonistes se sont grassement enrichis une fois la crise advenue et sur le dos d’un système aveugle et uniquement motivé par l’argent, ils frôlent la banqueroute avant que le marché ne se retourne. La fin leur donne raison mais ils auraient pu être les héros d’un film sur les nigauds de Wall Street…

Les acteurs jouent à des niveaux différents de narration. Ryan Gosling incarne le narrateur cynique et ouvertement imbu de lui-même. Suffisamment intelligent pour flairer le filon et tellement arrogant qu’il fait rire et emporte l’adhésion. Il regarde la caméra, et donc le spectateur, en roulant des mécaniques. Un vrai pourri assumé. Christian Bale est un médecin reconverti dans l’analyse stratégique, à la limite de l’autisme et fan de Hard Rock. Le voir écouter Master of Puppets ou Eye of the Beholder de Metallica en pianotant sur son clavier a tout du plaisir coupable. Steve Carrell est un hystérique touché par un drame familial, Brad Pitt est un ancien trader. Et ils forment une horde d’individualistes marginaux. Il faut voir le film pour épier leurs expressions, c’est du très haut niveau.

Janvier et février sont la saison des récompenses. Après les Golden Globes et avant les Oscars, les Producers Guild Awards 2016 ont distingué The Big Short comme film de l’année. Péripétie ? Quand l’on sait que le vainqueur des Oscars depuis 8 ans est immanquablement le film qui a remporté la récompense aux PGA, cela donne à réfléchir. The Big Short mérite-t-il la récompense suprême ? Je dirais que oui tant le film est fin et intelligent, en plus d’être drôle. Car le film pose le problème de telle manière que le spectateur ne peut que se demander s’il n’aurait pas lui-même tenté de profiter de la situation. Pour s’enrichir avant que le marché ne se retourne ou de s’enrichir une fois le marché effondré. Dans les deux cas, le doute persiste. L’enrichissement est-il critiquable si le système le permet effrontément ? La question finale est donc : comment un tel système d’inégalités est-il possible ? Vaste sujet qui nécessiterait au moins quelques autres films pour apporter une réponse convaincante… en attendant, The Big Short est un vrai plaisir de cinéma qu’il vous faut découvrir absolument.

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The Big Short le casse du siècle Wall Street. 2005. Profitant de l’aveuglement généralisé des grosses banques, des medias et du gouvernement, quatre outsiders anticipent l’explosion de la bulle financière et mettent au point… le casse du siècle ! Michael Burry, Mark Baum, Jared Vennett et Ben Rickert : des personnages visionnaires et hors du commun qui vont parier contre les banques … et tenter de rafler la mise !

Sortie : le 23 décembre 2015
Durée : 2h11
Réalisateur : Adam McKay
Avec :  Brad Pitt, Christian Bale, Ryan Gosling et Steve Carell
Genre : Drame, comédie, biopic

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NOS NOTES ...
Originalité
Scénario
Réalisation
Jeu des acteurs
Stanislas Claude
Rédacteur ciné, théâtre, musique, BD, expos, parisien de vie, culturaddict de coeur. Fondateur et responsable du site Culturaddict, rédacteur sur le site lifestyle Gentleman moderne. Stanislas a le statut d'érudit sur Publik’Art.
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