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Amaury Jacquet

Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.

“Dieu habite Düsseldorf”, la comédie piquante de Sébastien Thiéry à Avignon

Renaud Danner et Eric Verdun mettent en scène et interprètent avec brio les sept sketches incisifs et sortis de nulle part qui composent la traversée dadaïste et désopilante de Sébastien Thiéry.  Un as en la matière qui n’a pas son pareil pour démasquer et se moquer avec la perfidie qu’on lui connait, de la folie d’une époque, toujours plus déréglée et désincarnée - dont les deux personnages, complètement inadaptés à la vie, en se confrontant jusqu’ à l’absurde à des situations ubuesques - en sont la pathétique et dérisoire incarnation.

« Derniers remords avant l’oubli », le théâtre écrit et universel de Jean-Luc Lagarce 

a notoriété de Jean-Luc Lagarce, metteur en scène et dramaturge, mort prématurément du SIDA à l’âge de 38 ans en 1995, n’a cessé d’augmenter depuis sa disparition. S’il n’a pas été reconnu de son vivant comme un auteur important, c’est que son langage théâtral était trop en avance, trop en décalage sur son époque. Aujourd’hui, c’est un auteur majeur dont la langue singulière, qui creuse en profondeur, l’identifie immédiatement. Une forme stylistique faite de variations et de répétitions où la parole qui bute, trébuche, se reprend, sacralise à elle seule la dramaturgie à travers un dialogue ressassant, qui porte à son paroxysme la difficulté à être et à dire. « Derniers remords avant l’oubli » met en scène un trio qui s’est aimé dans les années 70 avant de se séparer.

« Shazam », le patchwork très accompli de Philippe Decouflé

Philippe Decouflé revient avec une pièce emblématique de son répertoire qui a marqué l’histoire de la compagnie. "Shazam" – abracadabra en anglais – est un précipité chorégraphique et visuel qui convoque sur une musique interprétée en live, tous les arts : mime, danse, magie, cirque, théâtre, et cinéma. Décomposé en 18 tableaux, on assiste à un ballet/cabaret hypnotique et burlesque où les séquences dansés, les illusions optiques et les jeux de miroirs s’enchainent à l’envi et avec brio.

Une plongée en absurdie : hilarante ! sur C8, le 2 juillet 2022

Sébastien Thiéry, comédien, est aussi auteur de pièces de théâtre où son écriture portée plutôt vers l’absurde et affranchie de toute morale, cohabite avec la comédie de boulevard, n’hésitant pas à déstabiliser le spectateur. C’est à une une crise d’identité aussi kafkaïenne que loufoque que nous convie Sébastien Thiéry avec un couple Jean-Claude et Nicole Bélier qui va devenir à l’insu de son plein gré, Henry et Nadine Schmitt !

Angelin Preljocaj joue avec la gravité : planant

Elle est invisible, impalpable et imma­nente. Qui ? La gravité bien sûr, cette force essentielle que le chorégraphe Angelin Preljocaj questionne avec brio dans son ballet pour treize danseurs.

« Nosztalgia Express », le voyage psychédélique et enlevé de Marc Lainé 

Marc Lainé continue de jouer avec les récits archétypiques de la culture populaire dans une enquête haute en couleur et des décors d’inspiration sixties de toute beauté en s’amusant donc, cette fois, à mélanger les genres. Avec sa galerie de personnages décalés, "Nosztalgia Express" oscille entre le roman d’espionnage et la comédie musicale pop, et fait entrer en collusion fiction intime et grande histoire. Au fil d'une intrigue qui se joue de Paris à Budapest entre 1956 et 1968, au moment où l’utopie communiste se fissure, la pièce déploie un scénario gigogne dans lequel présent, flash-backs, faits historiques et fantasmes s’entrechoquent sur fond de mélodrame à rebondissements et comédie loufoque. Divertissant.

59e palmarès des Prix du Syndicat professionnel de la critique Théâtre, Musique et Danse, olé !

Depuis 1963, les Prix du Syndicat de la Critique qui sont l’émanation d’un vote des critiques professionnels, saluent et récompensent les spectacles et les personnalités artistiques, que ce soit en théâtre, en musique ou en danse, qui ont marqué la saison. Illusions perdues, d’après Honoré de Balzac, dans la mise en scène de Pauline Bayle reçoit le Grand Prix théâtre, Encantado de Lia Rodrigues est désigné meilleur spectacle chorégraphique, Krzysztof Warlikowski avec L'Odyssée obtient du prix du meilleur spectacle étranger. Le Grand Prix musique est attribué à Œdipe d’Enesco dans la mise en scène de Wajdi Mouawad et la direction musicale d’Ingo Metzmacher, tandis que Le Ciel de Nantes (Christophe Honoré) ou La Seconde surprise de l’amour (Alain Françon) sont aussi récompensés.

William Forsythe repousse les limites de la danse, en majesté à Chaillot

Deux pièces majeures Quintett (1993) & One flat thing reproduced (2002) de William Forsythe interprétées par le Ballet de l’Opéra Lyon offrent toute la mesure et l’étendue de son art, forgé d’un vocabulaire à l’origine classique mais qu’il n’a eu cesse de déconstruire pour en déjouer les codes préétablis et l’ouvrir entre rupture, déséquilibre, virtuosité et fluidité organique/dynamique des corps. Le tout dans une esthétique (couleur de costume pour chaque interprète) qui fait partie intégrante de la chorégraphie.

Notre Sélection

« I will survive » : rire nerveux et malaise garanti

Avec I Will Survive, Les Chiens de Navarre rappellent une vérité simple : quand la réalité devient trop absurde pour être racontée, il ne reste plus qu’à l’exagérer pour qu’elle redevienne audible. Jean-Christophe Meurisse l’a bien compris : l’outrance n’est pas une facilité, mais un outil — une loupe déformante pour mieux scruter les recoins les plus gênants de la société française. Et c’est justement parce qu’il observe si finement qu’il grossit si fort.

Une École de danse d’une troublante modernité à la Comédie-Française

Il arrive que le théâtre ressuscite des œuvres qu’on croyait promises à l’oubli. Avec "L’École de danse", Clément Hervieu-Léger réalise précisément cela : redonner souffle à une comédie que Goldoni retira de l’affiche après deux malheureuses représentations. Un naufrage originel, devenu aujourd’hui matière à renaissance.